Voici une description de l'huĂźtre vue par Francis PONGE Francis Ponge - Le parti pris des choses 1942L'huĂźtreL'huĂźtre, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence plus rugueuse, d'une couleur moins unie, brillamment blanchĂątre. C'est un monde opiniĂątrement clos. Pourtant on peut l'ouvrir il faut alors la tenir au creux d'un torchon, se servir d'un couteau Ă©brĂ©chĂ© et peu franc, s'y reprendre Ă plusieurs fois. Les doigts curieux s'y coupent, s'y cassent les ongles c'est un travail grossier. Les coups qu'on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d'une sorte de l'intĂ©rieur l'on trouve tout un monde, Ă boire et Ă manger sous un firmament Ă proprement parler de nacre, les cieux d'en dessus s'affaissent sur les cieux d'en dessous, pour ne plus former qu'une mare, un sachet visqueux et verdĂątre, qui flue et reflue Ă l'odeur et Ă la vue, frangĂ© d'une dentelle noirĂątre sur les trĂšs rare une formule perle Ă leur gosier de nacre, d'oĂč l'on trouve aussitĂŽt Ă s'orner. La derniĂšre de Patrick SĂ©bastien
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Auteurs français âș XXe siĂšcle âș vous ĂȘtes iciAuteurs françaisFrancis Ponge1899 â 1988Sommaire Un poĂšte du dimanche » La reconnaissance Gros plan sur Le Parti pris des choses 1942 Extraits du Parti pris des choses LâhuĂźtre Le mimosa Le pain Le cageot Bibliographie Citations choisies Un poĂšte du dimanche »NĂ© Ă Montpellier, le 27 mars 1899, Francis Ponge fait des Ă©tudes de lettres, puis de droit. Il Ă©crit ses premiers textes et travaille quelques mois comme secrĂ©taire de fabrication aux Ă©ditions 1931, aprĂšs son mariage, il entre comme salariĂ© aux Messageries Hachette. Il se consacre Ă la poĂ©sie pendant ses moments libres. AprĂšs avoir frĂ©quentĂ© le groupe surrĂ©aliste, il adhĂšre au Parti en 1937, aprĂšs un violent mouvement de grĂšve, il travaille comme employĂ© dâassurance. EntrĂ© dans la RĂ©sistance en 41, il est un agent de liaison trĂšs actif, frĂ©quente les Ă©crivains combattants comme Ăluard et Camus. Il publie, en 1942, son premier grand recueil, Le Parti pris des choses composĂ© de trente-deux poĂšmes Ă©crits entre 1924 et 1939.La reconnaissanceEn 1944, un article Ă©logieux de Sartre vaut Ă Francis Ponge un dĂ©but de notoriĂ©tĂ©. Il continue Ă publier tout en donnant des confĂ©rences pour lâAlliance française ; en 1949 paraissent les ProĂȘmes, en 1952, La Rage de lâexpression et en 1961, Le Grand Recueil. Les articles de Philippe Sollersâč asseoient la rĂ©putation du poĂšte. Lui-mĂȘme publie, en 1965, un essai dans lequel il prĂ©cise ses positions thĂ©oriques et revendique lâhĂ©ritage des artisans de la langue et du verbe comme Malherbe. En 1984, câest un poĂšte dĂ©sormais incontestĂ© et cĂ©lĂ©brĂ© qui reçoit le grand prix de poĂ©sie de lâAcadĂ©mie Philippe Sollers De son vrai nom Philippe Joyaux, Philippe Sollers est un Ă©crivain français nĂ© Ă Talence en Gironde le 28 novembre plan sur Le Parti pris des choses 1942Le titre du recueil est en mĂȘme temps un manifeste. Francis Ponge a dĂ©fini ainsi le principe de son Ă©criture du Parti pris des choses câest avant tout donner lâinitiative aux choses, les laisser sâ sâagit pour lui de remplacer chaque objet par une formule » de langage qui lui soit exactement adĂ©quate. Pour ce poĂšte artisan, toutes les choses sont Ă©galement dignes dâĂȘtre exprimĂ©es ». Câest pourquoi le recueil sâattache Ă dĂ©crire des objets simples, quotidiens ordinairement ignorĂ©s par la tradition poĂ©tique. Le lyrisme nây a aucune place, mais toute lâattention est portĂ©e Ă lâĂ©criture. Ponge a dâailleurs avouĂ© sa prĂ©dilection pour les poĂštes classiques, comme Malherbe, Ă©pris de la puretĂ© des formes. Dans ses poĂšmes, aucun mot ne figure au hasard ; il est choisi pour ses affinitĂ©s graphiques ou sonores avec la chose quâil doit un article cĂ©lĂšbre, Jean-Paul Sartre a saluĂ© la naissance dâun poĂšte phĂ©nomĂ©nologue ». Il cĂ©lĂ©brait la construction de ces courts poĂšmes qui mĂȘlent indiffĂ©remment les ĂȘtres humains et les choses inanimĂ©es. Il reconnaissait Ă Francis Ponge le sens du fantastique moderne ». LâhuĂźtre » est lâun des poĂšmes les plus cĂ©lĂšbres du de la grosseur dâun galet moyen, est dâune apparence plus rugueuse, dâune couleur moins unie, brillamment blanchĂątre. Câest un monde opiniĂątrement clos. Pourtant on peut lâouvrir il faut alors la tenir au creux dâun torchon, se servir dâun couteau Ă©brĂ©chĂ© et peu franc, sây reprendre Ă plusieurs fois. Les doigts curieux sây coupent, sây cassent les ongles câest un travail grossier. Les coups quâon lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, dâune sorte de lâintĂ©rieur lâon trouve tout un monde, Ă boire et Ă manger sous un firmament Ă proprement parler de nacre, les cieux dâen dessus sâaffaissent sur les cieux dâen dessous, pour ne plus former quâune mare, un sachet visqueux et verdĂątre, qui flue et reflue Ă lâodeur et Ă la vue, frangĂ© dâune dentelle noirĂątre sur les bords. Parfois trĂšs rare une formule perle Ă leur gosier de nacre, dâoĂč lâon trouve aussitĂŽt Ă sâ Ponge, Le Parti pris des Choses, mimosaSur fond dâazur le voici, comme un personnage de la comĂ©die italienne, avec un rien dâhistrionisme saugrenu, poudrĂ© comme Pierrot, dans son costume Ă pois jaunes, le mimosa. Mais ce nâest pas un arbuste lunaire plutĂŽt solaire, multisolaire⊠Un caractĂšre dâune naĂŻve gloriole, vite dĂ©couragĂ©. Chaque grain nâest aucunement lisse, mais formĂ© de poils soyeux, un astre si lâon veut, Ă©toilĂ© au maximum. Les feuilles ont lâair de grandes plumes, trĂšs lĂ©gĂšres et cependant trĂšs accablĂ©es dâelles-mĂȘmes ; plus attendrissantes dĂšs lors que dâautres palmes, par lĂ aussi trĂšs distinguĂ©es. Et pourtant, il ya quelque chose actuellement vulgaire dans lâidĂ©e du mimosa ; câest une fleur qui vient dâĂȘtre vulgarisĂ©e. ⊠Comme dans tamaris il y a tamis, dans mimosa il y a Ponge, Le Parti pris des Choses, painLa surface du pain est merveilleuse dâabord Ă cause de cette impression quasi panoramique quâelle donne comme si lâon avait Ă sa disposition sous la main les Alpes, le Taurus ou la CordillĂšre des Andes. Ainsi donc une masse amorphe en train dâĂ©ructer fut glissĂ©e pour nous dans le four stellaire, oĂč durcissant elle sâest façonnĂ©e en vallĂ©es, crĂȘtes, ondulations, crevasses⊠Et tous ces plans dĂšs lors si nettement articulĂ©s, ces dalles minces oĂč la lumiĂšre avec application couche ses feux, â sans un regard pour la mollesse ignoble sous-jacente. Ce lĂąche et froid sous-sol que lâon nomme la mie a son tissu pareil Ă celui des Ă©ponges feuilles ou fleurs y sont comme des sĆurs siamoises soudĂ©es par tous les coudes Ă la fois. Lorsque le pain rassit ces fleurs fanent et se rĂ©trĂ©cissent elles se dĂ©tachent alors les unes des autres, et la masse en devient friable⊠Mais brisons-la car le pain doit ĂȘtre dans notre bouche moins objet de respect que de Ponge, Le Parti pris des Choses, cageotĂ mi-chemin de la cage au cachot la langue française a cageot , simple caissette Ă claire-voie vouĂ©e au transport de ces fruits qui de la moindre suffocation font Ă coup sĂ»r une maladie. AgencĂ© de façon quâau terme de son usage il puisse ĂȘtre brisĂ© sans effort, il ne sert pas deux fois. Ainsi dure-t-il moins encore que les denrĂ©es fondantes ou nuageuses quâil enferme. Ă tous les coins de rues qui aboutissent aux Halles, il luit alors de lâĂ©clat sans vanitĂ© du bois blanc. Tout neuf encore, et lĂ©gĂšrement ahuri dâĂȘtre dans une pose maladroite Ă la voirie jetĂ© sans retour, cet objet est en somme des plus sympathiques, â sur le sort duquel il convient toutefois de ne sâappesantir Ponge, Le Parti pris des Choses, Le Parti pris des choses 1942 ProĂȘmes 1948 La Rage de lâexpression 1952 Le Grand Recueil I. MĂ©thodes » 1961 ; II. Lyres » 1961 ; III PiĂšces » 1962 Pour un Malherbe 1965 Le Savon 1967 Entretiens avec Philippe Sollers 1970 La Fabrique du PrĂ© 1971 Comment une figue de parole et pourquoi 1977 Pratiques dâĂ©criture Ćuvres complĂštes, La PlĂ©iade volume I janvier 1999 ; volume II aoĂ»t 2002 ; Gallimard, Paris. Pages dâatelier 1917-1982, 2005 ; Gallimard, Paris Ensemble de textes inĂ©dits.Citations choisies Câest par sa mort parfois quâun homme montre quâil Ă©tait digne de vivre. Note sur les otages Il suffit dâabaisser notre prĂ©tention Ă dominer la nature et dâĂ©lever notre prĂ©tention Ă en faire physiquement partie, pour que la rĂ©conciliation ait lieu. Le Grand Recueil Comme de toute chose, il y a un secret du vin ; mais câest un secret quâil ne garde pas. On peut le lui faire dire il suffit de lâaimer, de le boire, de le placer Ă lâintĂ©rieur de soi-mĂȘme. Alors il parle. En toute confiance, il parle. Ă mi-chemin de la cage au cachot la langue française a cageot, simple caissette Ă claire-voie vouĂ©e au transport de ces fruits qui de la moindre suffocation font Ă coup sĂ»r une maladie. Le Parti pris des choses Câest surtout contre une tendance Ă lâidĂ©ologie patheuse que jâai inventĂ© mon parti pris. PoĂšmes Câest une grande composition digne du VĂ©ronĂšse pour lâambition et le volume, mais quâil faudrait peindre tout entiĂšre dans lâesprit du fameux Bar de Manet. Le Parti pris des choses Deux ou trois fois par jour⊠au milieu de ce culte, le courrier multicolore, radieux et bĂȘte comme un oiseau des Ăźles, tout frais Ă©moulu des enveloppes marquĂ©es de noir par le baiser de la poste, vient tout de go se poser devant moi. Le Parti pris des choses Le langage ne se refuse quâĂ une chose, câest Ă faire aussi peu de bruit que le silence. ProĂȘmes Les choses les plus Ă©paisses ne sâabordent pas sans subir quelque amenuisement⊠Le Parti pris des choses Mesdames et messieurs, lâĂ©clairage est oblique. Si quelquâun fait des gestes derriĂšre moi quâon mâavertisse. Je ne suis pas un bouffon. Le Parti pris des chosesâ Autres citations de Francis connexes Auteurs du XXe siĂšcle. Histoire de la France Le XXe siĂšcle. Courants littĂ©raires du XXe siĂšcle Le SurrĂ©alisme, lâExistentialisme, le Nouveau roman. LumiĂšre sur⊠LittĂ©rature et engagement au XXe siĂšcle. LâAcadĂ©mie française. Suggestion de livresRecherche sur le siteLorsquele pain rassit ces fleurs fanent et se rĂ©trĂ©cissent : elles se dĂ©tachent alors les unes des autres, et la masse en devient friable. Mais brisons-la : car le pain doit ĂȘtre dans notre bouche moins objet de respect que de consommation. Francis Ponge - Le parti pris des choses (1942)
Table des matiĂšres PrĂ©face, par Vincent Carraud. IntroductionAvertissement Le chant XXVI de lâEnferCommentaireVirgile, Dante, Ulysse, DiomĂšdeLe rĂ©cit dâUlysse La brĂšve oraison » dâUlysseLe vol fou dâUlysse PremiĂšre tire dâailes pour un vol fou⊠Chapitre premier1 - La thĂ©orie des quatre sensLe Banquet ConvitoLa Lettre Ă Cangrande della Scala2 - AllĂ©gorĂšse et exploration du mondeLâallĂ©gorie nĂ©oplatonicienne Nature aime Ă se cacher »LâAntre des Nymphes Chapitre II1 - CosmologieLa disparate du mondeLa structure gĂ©nĂ©rale du mondeLa prĂ©cession des Ă©quinoxesLa thĂ©orie de la trĂ©pidationLâimage du monde de Dante2 - GĂ©ographieLa figure de la TerreLa question des antipodes et le monde habitableLes mers et les continentsLe tracĂ© des cĂŽtes et lâocĂ©anLa figure des terres Ă©mergĂ©esLâocĂ©an Chapitre III1 - HistoireQuestions de mĂ©thode Lâesperienza [âŠ] del mondo senza gente »Histoire et progrĂšsLa lĂ©gitimitĂ© des Temps modernesLes Colonnes dâHerculeLâeffondrement de la confiance cosmique2 - Du dĂ©sir de connaĂźtre Ă la curiositĂ©Un dĂ©sir inscrit dans la nature humainePĂ©rĂ©grinations dâun dĂ©sir naturelVoirLes tribulations du dĂ©sir de savoirLa lĂ©gende des SirĂšnesLâascension du mont VentouxDescente dans les cavernes de lâEtnaUne curiositĂ© sans limites3 - Au delĂ de Dante, les Temps modernesLa modernitĂ© Ă lâaube des Temps modernesNicolas de CuesGiordano BrunoLâacquisition de la modernitĂ©Francis BaconLe cas DescartesLa modernitĂ© au dĂ©clin des Temps modernesGeorg Henrik Von Wright DeuxiĂšme partie.⊠lors fut la mer par-dessus nous reclose Chapitre IV1 - Lâastucieux Ulysse2 - AprĂšs HomĂšreLâhomo viator et le retour des SirĂšnesLâĂ©puisement de la figure homĂ©rique dâUlysseMouvement centripĂšte et mouvement centrifuge3 - LâUlysse de DanteLâouverture de la base homĂ©riqueDe la curiositĂ© Ă la dĂ©mesure4 - AprĂšs Dante Ce grand Ă©vĂ©nement qui parmi vous se tait »La fĂ©e Andronica, lâAriostoTorquato TassoLe retour Ă lâintĂ©rioritĂ©Lâinspiration lĂ©opardienneUlysse, le hĂ©ros extĂ©nuĂ©Alfred TennysonArturo GrafGiovanni PascoliSur le Pequod, Ă la poursuite de lâabsolu Chapitre V1 - MĂ©taphoresLâocĂ©an, mĂ©taphore de lâinfiniLa navigationLa conquĂȘte des mersAutres navigations2 - Naufrage et existenceNaufrage et histoireLa mort en merĂtre spectateurLa situation du rescapĂ©RobinsonExister avec le naufrageSeuls Ă seuls avec lâocĂ©anCuriositĂ© et engagement dans le monde3 - TransmissionLa transmission difficile Quelque chose de gigantesque⊠»Le passeur Ăpilogue1 - Aucun trĂ©passĂ© ne parle dâautre chose que de sa vie terrestreLâusage du libre arbitreNote sur la querelle du libre arbitre au XIIIe siĂšcleIl cammino della vita2 - Exploration du monde et exploration de soiAller au bout du monde Lâarchipel des Ăźles MardiLâespace labyrinthiqueAller au bout de soi-mĂȘmeAu-dessous du volcan ConclusionAu risque de la dĂ©chĂ©ance BibliographieĆuvres et textes de rĂ©fĂ©renceĂtudes Index * Extrait LâUlysse de Dante Lâouverture de la base homĂ©rique La base homĂ©rique, on lâa vu, donne Ă construire beaucoup de choses, comme des variations autour dâune structure fondamentale le retour dâUlysse. Or cette base, depuis lâĂ©poque proprement homĂ©rique des poĂšmes homĂ©riques, a considĂ©rablement Ă©voluĂ©, dans de multiples directions. DĂšs lâAntiquitĂ© classique, et bien plus encore au long du Moyen Ăge, elle sâest ouverte, avec des rĂ©sultats littĂ©raires au moins inĂ©gaux, souvent inattendus. Si, en gĂ©nĂ©ral, la partie consacrĂ©e aux voyages et au retour dâUlysse se maintient, la fin et la mort dâUlysse, en revanche, se perdent dans de multiples versions, enchevĂȘtrĂ©es, laissant pour ainsi dire ouverte la conclusion des poĂšmes [1]. Pour suivre Stanford [2], câest cet Ă©tat de la tradition homĂ©rique, ajoutĂ© Ă la connaissance trĂšs partielle [3] quâil en avait et Ă lâadaptability de la figure dâUlysse, qui explique que Dante a pu se sentir autorisĂ© Ă inventer de toutes piĂšces, ou presque, une fin totalement contraire Ă la structure et Ă lâesprit des poĂšmes la disparition du paradigme du retour et le renversement du mouvement centripĂšte en mouvement centrifuge, il se produit donc beaucoup plus quâun dĂ©veloppement, il y a une rupture et bel et bien une ouverture de la structure de base homĂ©rique traditionnelle. DĂ©sormais, le rĂ©cit ne se termine plus de la mĂȘme façon, et cela change tout il nâarrive pas seulement autre chose aux personnages, nous avons affaire Ă dâautres personnages, Ă un Ulysse nouveau, habitĂ© de tout autres pensĂ©es. Ainsi donc, lorsque Dante met Ă profit lâindĂ©termination reçue dâune tradition homĂ©rique lacunaire quant Ă la fin dâUlysse, il opĂšre un renversement inattendu [4] qui relĂšve presque de la provocation. La mort ocĂ©anique quâil rĂ©serve Ă son Ulysse excĂšde Ă©videmment le cadre mĂ©diterranĂ©en, mais inverse complĂštement les ressorts du personnage dâUlysse un dĂ©sir insensĂ© de connaĂźtre prend la place du mal du pays, lâáœÏÏÎč [hubris] celle de la nostalgie, le mouvement centripĂšte qui le rapproche dâIthaque devient un mouvement centrifuge. Ce renversement et cette provocation sont dâautant plus remarquables que Dante nâinvente rien. En fait, il prend au sĂ©rieux, et mĂȘme au tragique, une fin possible dâUlysse imaginĂ©e dĂšs lâAntiquitĂ© sur le mode de la fiction parodique, par Lucien de Samosate [5].Le voyage â imaginaire â au-delĂ des limites du monde connu est, ou sera, un thĂšme de fiction classique et en ce sens, le rĂ©cit de Lucien relĂšve au dĂ©part de lâintention de faire du HomĂšre Ă lâenvers et de dĂ©figurer la figure dâUlysse, il nâengage que son imagination JâĂ©cris donc sur des choses que je nâai jamais vues, des aventures que je nâai pas eues et que personne ne mâa racontĂ©es, des choses qui nâexistent pas du tout et qui ne sauraient commencer dâexister [6]. » Chez Dante, Ă supposer quâil ait connu Lucien, dont il retrouve Ă©trangement les termes mĂȘmes pour dĂ©crire le voyage dâUlysse et la tempĂȘte finale [7], cette fin â qui nâest quâun dĂ©but dans le texte de Lucien â nâa Ă©videmment rien de parodique. On voit comment elle vient dâune part boucler toute lâĂ©volution littĂ©raire du traitement du thĂšme dâUlysse, et dâautre part sâadosser au pressentiment propre Ă la fin du Moyen Ăge de lâeffondrement du cosmos. On ne sâattendait guĂšre/De voir Ulysse en cette affaire »Illustration de Jean-Baptiste Oudry, Livre X, fable II. Dante libĂšre la figure dâUlysse en la dĂ©solidarisant non seulement de la gĂ©ographie homĂ©rique mais aussi de sa teneur anthropologique plutĂŽt rassurante. Son Ulysse nâest plus lâhomme du retour, retenu sĂ©parĂ© des siens par un exil douloureux loin de son Ăźle, pĂ©tri de sentiments familiaux et ne pensant quâau bonheur fini de vivre sur sa terre natale. LâUlysse de Dante incarne une nouvelle forme de libertĂ©, inquiĂ©tante, faite de liens dĂ©chirĂ©s et dâattaches rompues, mais tĂ©moignant aussi de forces secrĂštement liĂ©es au dĂ©sir et au vertige de la transgression. Ce nâest sans doute pas assez pour en faire un moderne, ni pour justifier sans discussion la future rĂ©cupĂ©ration romantique [8], car ce hĂ©ros reste nĂ©gatif et interdit dâĆuvre ; mais câest trop pour un Moyen Ăge dont il fait craquer tous les repĂšres. Ce qui est sĂ»r, câest que la destruction de la figure homĂ©rique entraĂźne avec elle la destruction du mythe, liĂ© Ă son illustration possible dans les voyages dâUlysse, sur lequel reposera une dialectique dâapparence hĂ©gĂ©lienne, celle qui rĂ©sout les contradictions et reconduit heureusement les contraires Ă lâidentitĂ©. Ce qui sâĂ©vanouit ainsi, câest ce quâon pourrait appeler la mythologie du chez-soi, du retour Ă soi-mĂȘme Ă partir de lâĂȘtre-autre. Ce qui est fondamental avec lâUlysse de Dante, plus encore que la transgression qui dirige vers lâinfini, câest donc, si lâon considĂšre les choses du point de vue de la force qui dĂ©finit sa trajectoire â centrifuge â, le fait radicalement dĂ©stabilisant quâUlysse ne revient pas chez lui et nây reviendra jamais. Lâhomme du retour est devenu lâhomme du non-retour. LâIthaque qui symbolise le terme de tout voyage, la conclusion heureuse de toute sĂ©paration, cette Ithaque nâest plus Ă lâhorizon. Et il est clair que lâUlysse de Dante, contrairement Ă ce que dit HomĂšre dans les premiers vers de lâOdyssĂ©e, ne se soucie pas de rentrer chez lui. De lĂ rĂ©sulte le sens profond de lâĂ©vitement de cette Ă©tape dans la Divine ComĂ©die. On peut certes se demander, Ă la lecture des vers 95-97 du chant XXVI de lâEnfer, oĂč Ulysse Ă©voque ses liens familiaux et ses devoirs Ă lâĂ©gard de PĂ©nĂ©lope, sâil a lancĂ© son expĂ©dition au-delĂ des colonnes dâHercule directement aprĂšs sâĂȘtre sĂ©parĂ© de CircĂ©, ou sâil est repassĂ© Ă Ithaque, avant de repartir pour de nouvelles aventures ; mais si, comme cela semble ĂȘtre le cas, il est parti directement au grand large depuis lâĂźle de CircĂ©, alors, il est bien lâhomme du non-retour, il nâest jamais rentrĂ© chez lui. Et il convient dâinsister lâĂ©pisode de lâEnfer consacrĂ© Ă Ulysse est Ă un tel point en rupture avec la tradition homĂ©rique quâil se prĂ©sente comme mettant un terme dĂ©finitif aux aventures dâUlysse, enfermĂ© dâune part dans une figure centrifuge qui exclut tout retour Ă Ithaque, emportĂ© dâautre part, avec son navire, vers une mort en mer appelĂ©e Ă le faire disparaĂźtre dans un oubli entier. Le dernier vers du chant XXVI signifie presque explicitement que lâhistoire qui vient dâĂȘtre racontĂ©e est une histoire dont on ne parlera plus infin che l mar fu sovra noi richiuso [9] ». La chute elliptique dĂ©courage toute tentation de romantisme et installe dans le poĂšme un silence da alfa ad omega [10]. Dante use de cette expression Ă la fin de la Lettre Ă Cangrande [11]. Expliquant son oeuvre, au terme dâune rĂ©capitulation de son propre voyage, de son ascension de ciel en ciel et donc du principe jusquâĂ la fin, Dante entend ainsi marquer fortement le caractĂšre totalisant de son voyage. Ce caractĂšre sâoppose, Ă©videmment, Ă lâerrance qui caractĂ©rise les voyages dâUlysse et interdit tout autant le retour que lâarrivĂ©e Ă bon port. La rĂ©fĂ©rence Ă lâalpha et Ă lâomĂ©ga introduit une rĂšgle de clĂŽture si lâon est parti du principe et parvenu Ă la fin, tous les champs de recherche ont Ă©tĂ© Ă©puisĂ©s et il nây a plus rien Ă chercher. Toute dĂ©marche dâexploration serait-elle vide de sens ? C âest peut-ĂȘtre le cas, en effet, dans le cosmos parfaitement clos de Dante. De la curiositĂ© Ă la dĂ©mesure Si câest comme conseiller perfide quâil se trouve en Enfer, Ulysse ne saurait pour autant ĂȘtre enfermĂ© dans sa seule habiletĂ© Ă tromper, il est non moins curieux, et câest ce trait que retient Dante, au chant XXVI. Ă cet Ă©gard, Ulysse se distingue grandement dâune figure que lâon serait tentĂ© de rapprocher de lui, celle de ]ason [12] Dans leur quĂȘte de la Toison dâor, les Argonautes sont intĂ©ressĂ©s, alors quâUlysse, mĂ» par sa seule curiositĂ©, apparaĂźt comme un personnage remarquable, puisque son mobile nâest ni lâargent, ni la gloire, ni la piĂ©tĂ© et quâil ne partage pas les alibis usuels des voyageurs lointains. Et sur ce point, Dante sait Ă©clairer et approfondir les choses. Il a vu en Ulysse un dĂ©sir de savoir assez singulier, en fait dâune puissance exceptionnelle qui en redĂ©finir la nature. Chez HomĂšre, la curiositĂ© dâUlysse est une caractĂ©ristique parmi dâautres ; chez Dante, cette caractĂ©ristique envahit lâensemble du personnage [13] et modifie le style de toutes les autres. Il en rĂ©sulte que ce que Dante met en scĂšne, et peut-ĂȘtre condamne, dans le vol fou dâ Ulysse, câest lâorgueil ou la dĂ©mesure, mais ce nâest pas on ne sait quelle modernitĂ©. Autre chose est la reprĂ©sentation de la dĂ©mesure comme une annonce de la modernitĂ©, ce dont on aurait tort de tirer que Dante lâaurait vue venir et la condamnerait. Tout au plus voyait-il peut-ĂȘtre le Moyen Ăge sâeffondrer, comme il nous montre Ulysse â qui traduit quand mĂȘme plutĂŽt lâAntiquitĂ© â ĂȘtre englouti et sâenfoncer. LâáœÏÏÎč, qui fait sans doute pour une grande part, la spĂ©cificitĂ© de lâUlysse de Dante, nâa pas vraiment de rapport avec la modernitĂ©. La notion, comme on le sait, a Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e dans la GrĂšce antique et a vraisemblablement Ă©tĂ© importĂ©e par HĂ©rodote depuis le champ de la tragĂ©die grecque, originaire-ment elle vise les despotes qui abusent de leur pouvoir et ne respectent pas les lois communes, elle vise les atteintes Ă lâordre voulu par les dieux [14]. Cette incrimination convient donc parfaitement Ă lâUlysse de Dante qui, littĂ©ralement, va trop loin. Comme convient aussi alors la fin appelĂ©e par cet excĂšs, si bien quâUlysse est, en ce sens, responsable, ou cause, de ce qui lui arrive, et lâon approfondit davantage le portrait de lâUlysse de Dante, sans sâarrĂȘter Ă la description, assez convenue, donnĂ©e en termes dâáœÏÏÎč, on observera que lâinterdit quâil enfreint, en fait, nâest pas exactement celui que posent les colonnes dâHercule. Si naturellement le passage de Gibraltar peut encore susciter quelque apprĂ©hension, la mythologie des colonnes dâHercule ne vaut plus guĂšre, du moins sĂ©rieusement, en cette fin de Moyen Ăge. Mais ce qui est dit par Dante, au moins dans lâintensitĂ© de son expression poĂ©tique, câest quâUlysse est un hĂ©ros qui est Ă la recherche de lâextrĂȘme, qui trouve au fond la signification de ses actes dans la confrontation Ă lâĂ©chec, comme atteinte ou Ă©preuve des limites. Il symbolise bien ce que peut ou ne peut pas lâhomme, sans la grĂące faire son salut dans lâhistoire, et sans le contexte, proprement mĂ©taphysique ou thĂ©ologique, atteste bien quâil sâagit du salut de lâĂąme et non dâune improbable modernitĂ©. Comme on lâa dĂ©jĂ observĂ©, en effet, lâĂ©pisode du dernier voyage dâUlysse sâaccomplit dans un univers de sens assez bien dĂ©fini. Dante ne cesse dây rĂ©activer le motif prophĂ©tique du peuple juif dans le dĂ©sert et de la sortie dâĂgypte, constante et puissante figuration historique de la dĂ©livrance et du salut. Se dessine ainsi nettement une insistante homologie entre 1â OdyssĂ©e et lâExode, Ithaque et la Terre promise, le sens gĂ©ographique du retour et le sens spirituel de lâexilâ. Tout cela prĂ©pare pour Ulysse un destin singulier. Car lâUlysse de Dante pose manifestement un problĂšme dans la mesure oĂč dâun cĂŽtĂ© ce quâil entreprend est proprement inouĂŻ, mais dans la mesure aussi oĂč, de lâautre cĂŽtĂ©, cette entreprise inouĂŻe sâachĂšve en un Ă©chec sans reste. Dans le contexte donnĂ© dâune histoire du salut, on ne peut quâen conclure Ă la fois Ă la perte des antiques certitudes concernant la fiabilitĂ© du cosmos, mais en mĂȘme temps, Ă lâimpossibilitĂ© de valider toute autre solution de salut tant quâon reste dans cette problĂ©matique oĂč aucune grĂące nâest promise. De lĂ , lâĂ©chec total â on serait tentĂ© de dire dĂ©finitif â de la tentative audacieuse dâUlysse, mais aussi son caractĂšre infiniment, et dĂ©finitivement fascinant. Mais il y a lĂ un peu plus que rien. En effet, si la voie dâun salut transgressif est â dĂ©finitivement ? â barrĂ©e par lâĂ©chec dâUlysse, le salut promis dans la rĂ©gion des anciennes certitudes mĂ©diĂ©vales est lui aussi trĂšs rĂ©ellement frappĂ© de nullitĂ© par lâentreprise mĂȘme dâUlysse, puisquâil nây a pas dâautre choix possible que lâentreprise de Dante, qui met son espoir en un salut transcendant, mais qui nâest peut-ĂȘtre pas aussi assurĂ©e quâon le croit parfois. Que le drame, vĂ©cu jusquâĂ la mort, par lâUlysse de Dante, se nourrisse ou sâexaspĂšre de cette incertitude quant Ă la consistance radicale du monde, cela pourrait bien comporter une leçon assez large, peut-ĂȘtre moment est sans doute venu dâexaminer la question de lâattitude de Dante Ă lâĂ©gard de la figure dâUlysse, cette figure qui, Ă bien des Ă©gards, lui tourne le dos et pas seulement en raison de sa condamnation aux peines infernales. On a souvent soulignĂ© combien, en raison de ce que ces pages de la Divine ComĂ©die ont dâindĂ©niablement sublime, il est difficile de ne pas admettre une indĂ©finissable proximitĂ©, une incontestable sympathie de Dante Ă lâĂ©gard de ce damnĂ©. On a manifestement affaire Ă un cas du mĂȘme genre que lâĂ©pisode de Francesca et Paolo [15] voir lâĂ©treinte de leurs corps frissonnants de dĂ©sir au cĆur de leur supplice entraĂźne une irrĂ©sistible compassion, et peut-ĂȘtre davantage. Et si Dante, au fond, secrĂštement, donnait raison Ă son Ulysse ? Quoi quâil en soit lâUlysse de Dante fait problĂšme dans son contexte historique prĂ©cisĂ©ment parce quâil le met en question. Et lâon est bien obligĂ© de sâinterdire toute conclusion Ă son sujet, car il nâengage en fait Ă rien, et il nây a rien Ă en dire. Le poĂšme de Dante est la mise en question simple du voyage dâUlysse, mais aussi, inĂ©vitablement, du propre voyage de Dante. On peut soutenir en effet que le salut chrĂ©tien est pessimiste quant Ă ce monde, et cela le rapproche, ou ne lâĂ©loigne pas tant de lâĂ©chec du voyage dâUlysse la voie chrĂ©tienne du salut, tentĂ©e par Dante, se dĂ©ploie dans un autre monde, aprĂšs jugement. Il nây a rien Ă en attendre ici-bas, et Dante connaĂźt parfaitement le monde terrestre et ses limites. p. 248-256 * La critique de Yannick Haenel Transfuge 99-100, juin-juillet 2016. Zoom cliquez lâimage. * Lâanalyse de Karim Oukaci La plus extraordinaire des choses littĂ©raires », disait Borges de la Divine ComĂ©die. Jean-Louis Poirier vient de consacrer Ă lâun des plus sublimes passages de lâEnfer, qui forme le premier cantique de la Commedia, et le plus pittoresque, un commentaire Ă bien des Ă©gards trĂšs extraordinaire. Au chant XXVI de lâEnfer, Ulysse surgit dâune fosse obscure sous la forme dâune langue de feu pour donner le rĂ©cit de son dernier voyage au-delĂ des limites du monde connu. Ces vers fascinants ont Ă©tĂ© lâobjet dâune glose considĂ©rable depuis plus dâun siĂšcle quarante pages dâindications bibliographiques si lâon ouvre par exemple Seriacopi 1994. Mais câest lâinterprĂ©tation quâen fit Hans Blumenberg qui intĂ©resse lâauteur un Ă©vĂ©nement thĂ©orique Ă part entiĂšre », p. 4, et qui fait toute la nouveautĂ© de son ouvrage dans les Ă©tudes dantesques. Lâintroduction p. 1-10 propose de voir dans lâaventure dâUlysse la tentative sans doute la plus entiĂšre de mise en question radicale du monde » p. 1, et interroge cette signification gĂ©nĂ©rale â pour Dante en premier lieu, pour nous ensuite, qui sommes les hĂ©ritiers de la modernitĂ© que le poĂšte florentin a prĂ©cĂ©dĂ©e nây aurait-il pas dans ce dĂ©sir de connaĂźtre lâinconnu, auquel Ulysse sacrifie tout jusquâĂ en perdre la raison il folle volo et la vie il mar sovra noi, quelque chose comme lâindice de la configuration dâun monde qui sâanĂ©antit, en la nĂ©cessitĂ© duquel lâhomme ne parvient plus Ă se fier, contre lequel il lui faut dĂ©sormais sâaffirmer, ne serait-ce quâĂ titre de contingence ? Ce questionnement sur lâUlysse de Dante, orientĂ© par une problĂ©matique Ă la fois cosmologique et mĂ©taphysique, va conduire lâauteur Ă investir tout aussi bien, puisquâil sâagit de poĂ©tique, de mĂ©moire et de transmission, lâanalyse des mĂ©taphores lâocĂ©an, la navigation, le naufrage, etc. que lâhistoire des concepts le dĂ©sir de savoir, la curiositĂ©, la limite, etc.. Gustave DorĂ©, Inferno XXVI. Au prĂ©alable, JL Poirier se fait traducteur et commentateur du Canto di Ulisse p. 13-55. De sa traduction des terzine en prose p. 14-23, lâauteur avertit quâelle est volontairement Ă©lĂ©mentaire, exactement sans qualitĂ© » p. 11. On reconnaĂźtra, quoi quâil en dise, quâelle est limpide, explicative, Ă©clairante au vers 57, lâira est attribuĂ©e Ă Dieu de maniĂšre trĂšs explicite comme ils provoquĂšrent ensemble la colĂšre divine » ; au vers 72, la tua lingua est rendue par ton discours » ; la notion de vertu valore au vers 99 rimant avec ardore, virtute au vers 120 est comprise comme valeur et excellence ; lâalto passo du vers 132 le pas suprĂȘme » pour Longnon, la haute aventure » pour PĂ©zard devient ici la grande traversĂ©e ». â Quant au commentaire p. 25-55, câest Ă notre connaissance le premier Ă ĂȘtre publiĂ© en français qui soit si prĂ©cis et si dĂ©veloppĂ©, attentif Ă la question de lâintertextualitĂ© comme lâessai de Giglio 1997, soucieux du dĂ©tail et de la structure comme lâĂ©tude de Sasso 2011. On se souvient peut-ĂȘtre quâAndrĂ© PĂ©zard, au dĂ©tour dâune note, avait promis Ă ses lecteurs une Damnation dâUlysse, qui ne parut jamais quoique des fragments de ce quâelle eĂ»t pu ĂȘtre soient prĂ©sents dans lâUlisse que Pagliaro dĂ©dia au maĂźtre français. Or, si la Damnation de PĂ©zard ne fut pas Ă©crite, câest semble-t-il quâelle ne pouvait pas lâĂȘtre, car JL Poirier, tout en comblant en quelque sorte ce manque, convainc assez facilement que, dans le cas dâUlysse, damnation et justification sâentremĂȘlent sur un mode prodigieusement complexe Tout le texte de Dante, toutes ses rĂ©fĂ©rences, tout son ancrage historique montrent que ce [dĂ©sir de savoir pour lequel il meurt] est naturel, inscrit profondĂ©ment dans la nature de lâhomme » p. 55. Les moments successifs de lâInferno XXVI, depuis lâadresse Ă Florence jusquâĂ lâorazion picciola dâUlysse et Ă sa fabuleuse narration du drame final, sont donc examinĂ©s dans leur littĂ©ralitĂ©, ainsi que dans leurs sources bibliques et classiques, lâimportance probable de CicĂ©ron, De Fin. V, 16-18 Ă©tant signalĂ©e. La premiĂšre partie p. 57-226 prĂ©sente la suggestion infiniment sĂ©duisante quâau-delĂ de la passion de lâunitĂ© qui anime la doctrine de la Divine ComĂ©die, il y a aussi en elle une intuition de contradictions ou, si lâon ose dire, une conscience malheureuse, dĂ©chirĂ©e par certaines nĂ©gativitĂ©s dont lâĂ©pisode dâUlysse serait lâun des signes les plus puissants. On ne sâĂ©tonnera pas que le chapitre premier p. 59-82 rappelle lâambivalence de lâĂ©criture de Dante, tant lâallĂ©gorisation lui est inhĂ©rente, et expose la rĂšgle que lui-mĂȘme trĂšs tĂŽt formula, inquiet que la profondeur de sa pensĂ©e ne fĂ»t pas pĂ©nĂ©trĂ©e, et quâil prit soin de thĂ©oriser dans le Convivio la lettre de ses sonnets, chansons, poĂšmes requiert une lecture indispensablement allĂ©gorique â exigence que lâon retrouve dans une expression rudimentaire au § 7 de lâĂpĂźtre Ă Cangrande istius operis non est simplex sensus, immo polysemum ». Lâauteur insiste sur lâhĂ©ritage que constitue le prĂ©cĂ©dent de lâexĂ©gĂšse propre aux traditions des enseignements nĂ©oplatonicien et chrĂ©tien, Ă©trangement parallĂšles sur le point de traiter la figure dâUlysse, quâelle apparaisse chez HomĂšre ou Platon, comme le lieu dâune allĂ©gorĂšse systĂ©matique â ce quâattestent les Ă©crits de ClĂ©ment dâAlexandrie, de Plotin, de Porphyre, dont lâexercice magnifique sur LâAntre des nymphes est Ă©tudiĂ© en dĂ©tail p. 78-82. Câest Jean PĂ©pin dĂ©jĂ qui, dans son article sur lâUlysse platonicien et chrĂ©tien », faisait observer, tout en soupçonnant une origine gnostique Ă cette douteuse proximitĂ©, quâUlysse fut le principal des mythes grecs pour la rĂ©ception desquels les textes patristiques purent bĂ©nĂ©ficier de maniĂšre plus ou moins directe de lâexĂ©gĂšse mĂ©dio-platonicienne. Pour procĂ©der Ă la dĂ©licate allĂ©gorĂšse de lâUlysse de Dante, les chapitres II et III font lâhypothĂšse que cette figure exceptionnelle que le poĂšte rĂ©inventa par seul droit de gĂ©nie correspond en fait Ă une rupture dans la dĂ©termination mĂ©diĂ©vale de lâordre cosmique et gĂ©ographique dâune part p. 83-127, de lâordonnance de la question du salut dâautre part p. 129-226 â dĂ©termination que toute la Commedia sâattache, pourtant, Ă confirmer chant aprĂšs chant. Ainsi il conviendrait de discerner que la reprise par Dante de lâastronomie ptolĂ©maĂŻque se complique dâune dramatisation de quelques principes thĂ©oriques prĂ©cession des Ă©quinoxes, thĂ©orie de la trĂ©pidation qui a pour effet de faire entrer lâirrationnel dans ce que le monde sensible a de plus Ă©levĂ© p. 83-103. Pareillement, la gĂ©ographie du monde habitĂ© se trouve confrontĂ©e Ă lâirrationalitĂ© des antipodes, de lâocĂ©an austral, de lâantigĂ©ographie infernale et de ce qui en est la cause mĂ©taphysiquement effrayante en termes de crĂ©ation, la chute de celui que le chant XXXIV dĂ©crit con paura p. 103-127. Le chapitre III, relatif Ă lâĂ©conomie du salut, reprend dans des pages brillantes les analyses patiemment minutieuses de Blumenberg sur les concepts de modernitĂ© et de curiositĂ© dont La LĂ©gitimitĂ© des Temps modernes faisait entre autres choses lâhistoire. Le voyage dâUlysse, loin dâĂȘtre lâemblĂšme sĂ©cularisĂ© dâun itinerarium mentis ad Deum, serait donc un contrecoup du sentiment diffus que sâĂ©tait Ă©puisĂ©e lâidĂ©e mĂ©taphysique de cosmos, câest-Ă -dire dâun ĂȘtre du monde adĂ©quat Ă lâessence divine â et cela avant mĂȘme que ne commençùt la modernitĂ© ce qui caractĂ©risera cette modernitĂ© ..., rĂ©sume lâauteur, câest la disjonction de la mĂ©taphysique et de la thĂ©ologie, et donc la possibilitĂ© dâun monde qui ne soit pas un cosmos, dâun monde qui ne soit pas la rĂ©alisation dâun modĂšle ou, si lâon peut dire, dâun monde qui ne ressemble Ă rien. On comprend que, jetĂ© dans un tel monde, lâUlysse de Dante nâait eu dâautre pensĂ©e que dâen sortir ... » p. 141. Lâune des consĂ©quences de cette perte de confiance dans le monde » p. 145 serait une modification de lâattitude thĂ©orique Ă son Ă©gard p. 146-226 lâhistoire conceptuelle du dĂ©sir de savoir, de ses altĂ©rations en concupiscence et en curiositĂ© est alors retracĂ©e Ă lâaide de renvois Ă Platon, Aristote, CicĂ©ron, Augustin, au PĂ©trarque du mont Ventoux, au LĂ©onard des cavernes de lâEtna, etc. p. 146-190, jusquâaux positions pleinement modernes de Nicolas de Cues et de Giordano Bruno p. 190-221, le Cusain et le Nolain de Blumenberg. Lâauteur fait remarquer ce que cette attitude moderne a en dĂ©finitive de tragique La quĂȘte moderne du savoir mime une quĂȘte de lâabsolu, elle porte une ouverture Ă la transcendance, mais elle reste prisonniĂšre du monde ici-bas » p. 191 - tragique que lâUlysse dantesque annonce, non sans contredire Dante lui-mĂȘme jusquâau dernier degrĂ©. La seconde partie 227-349 complĂšte lâĂ©tude de la fable que contient lâInf. XXVI par celle de la signification quâelle a pu prendre dans diffĂ©rentes rĂ©ceptions modernes et contemporaines. Le chapitre IV p. 229-302 part du travail de Stanford sur la complexitĂ© et la plasticitĂ© de la matiĂšre du thĂšme ulyssĂ©en pour y rechercher un invariant possible Ă travers lâhistoire des variations poĂ©tiques depuis le prototype homĂ©rique. Cet invariant serait moins lâidĂ©e de retour que celle dâerrance, qui associe la ÎŒáżÎč aux ÎœÎ±Ï ÎčÎșᜱ de façon plus fondamentale. Cela expliquerait quâĂ la maniĂšre de lâOdyssĂ©e dont la grandeur, disait Genette, est dâĂȘtre devenue un point de mire de lâĂ©criture hypertextuelle, lâUlysse de Dante soit devenu Ă son tour lâhypotexte privilĂ©giĂ© de poĂštes et de romanciers aussi gĂ©niaux et dissemblables que le Tasse, lâArioste, Leopardi, Tennyson, Arturo Graf, Pascoli et Melville. Leurs appropriations respectives de lâInf. XXVI sont lâune aprĂšs lâautre considĂ©rĂ©es. Le dernier chapitre p. 303-349 reprend thĂ©matiquement les mĂ©taphores de lâocĂ©an, de la navigation et du naufrage avec pour rĂ©fĂ©rences Platon, Primo Levi, le Blumenberg de Naufrage avec spectateur, et sâintĂ©resse Ă la fonction de transmission quâun mythe comme celui dâUlysse a pour fin de remplir â Ă©tant donnĂ©, comme dirait Blumenberg encore, la diffĂ©rence dâextension entre mĂ©taphorique et mĂ©taphysique. Sous ce rapport, lâauteur note quâil nây a pas grand sens Ă faire de Dante le prophĂšte de la modernitĂ© p. 335, puisque, par lâĂ©quipĂ©e dâUlysse, le poĂšte sâĂ©tablit en passeur dâune expĂ©rience per dar lui esperĂŻenza piena, dira Inf. XXVIII, 48, celle de la mise en question dâun monde fini », et que cette expĂ©rience sâordonne Ă un besoin de transmission, qui ouvre sans doute Ă une espĂ©rance » p. 348. De cette espĂ©rance, lâĂ©pilogue p. 351-370 et la conclusion p. 371-373 ne font guĂšre Ă©tat ils insistent sur une nouvelle modalitĂ© existentielle une chose post-moderne », p. 362 que lâauteur appelle la dĂ©chĂ©ance la dĂ©chĂ©ance nâest ni salut ni damnation. Entre les deux, elle est plutĂŽt lâexpĂ©rience effrayante de lâimpossible nĂ©ant de soi-mĂȘme ... », p. 361. Ă titre de tĂ©moin, dâUlysse postmoderne, le hĂ©ros dâUnder the Volcano, le roman de Malcolm Lowry, montre dâaprĂšs lâauteur que ce nâest pas lâabsence de salut qui rend la vie impossible, mais la vie mĂȘme qui rend tout salut impossible » p. 369, faisant donc prĂ©cĂ©der devant toute autre question celle, anthropologique, du besoin de salut, dont le contenu est redĂ©fini comme besoin de reconnaissance la dĂ©chĂ©ance fait donc apparaĂźtre, plus encore que le dĂ©sir dâĂȘtre sauvĂ©, le besoin dâĂȘtre jugĂ©, le besoin de faire reconnaĂźtre ce que nous sommes, le besoin de justification » p. 372. Quâon nous permette de dire avec briĂšvetĂ© que dans ce livre, lâun des plus beaux et des plus denses, trĂšs certainement, de tous ceux consacrĂ©s Ă lâĂ©tude de la pensĂ©e dantesque, on ne peut quâadmirer sans rĂ©serve lâimmensitĂ© de lâĂ©rudition, la profondeur de lâenquĂȘte, la finesse des analyses, le charme dâun style plein dâironie â toutes qualitĂ©s qui assurent un plaisir auquel il est facile et mĂȘme lĂ©gitime de se laisser prendre une lĂ©gitimitĂ© du plaisir dont convient Dante en toutes lettres au chant XXVII du Purgatoire lo tuo piacere omai prendi per duce. Difficile aussi de ne pas se laisser convaincre par les conclusions de JL Poirier sur la richesse et les contradictions de lâUlysse italien, sur lâactualitĂ© de la mĂ©taphore du naufrage quâelle tire sa force de la poĂ©sie dantesque ou mallarmĂ©enne, sur le dĂ©sespoir dâune postmodernitĂ© prĂšs dâen revenir Ă la sagesse que SilĂšne selon Aristote finit par avouer au roi qui lâavait capturĂ©. â Moins Ă©videntes bien que la nature de lâouvrage interdĂźt que lâauteur les expliquĂąt avec la moindre ampleur nous semblent certaines propositions reprises de Blumenberg sur la fiabilitĂ© supposĂ©e du monde antique, sur la disparition corrĂ©lative de ce sentiment, si câen est un, Ă la modernitĂ© il nâest pas aisĂ© dâĂȘtre dâaccord, sans plus de preuves textuelles, avec lâallĂ©gation que cette angoisse ait Ă©tĂ© inconnue des Anciens et que lâhistoire de ce sentiment commence seulement Ă la fin du Moyen Ăge, mĂȘme si lâon prend la prĂ©caution dâajouter â prudence qui change fort peu de choses Ă lâaffaire â quâil serait plus que tout question ici de son articulation avec une conception de lâacte qui se limiterait Ă la perspective de lâimmanence. Pour ce qui est de lâĂ©dition, le lecteur aura la satisfaction de la trouver formellement impeccable, en vĂ©ritĂ© au-dessus de tout reproche une seule erreur de typographie en prĂšs de 400 pages, et encore sâagit-il dâun accent, p. 201 ; un nom sâinsĂšre mal Ă propos entre deux mots, p. 228. Sans doute aussi devra-t-il prĂȘter son attention Ă la n. 10, p. 27, Ă la n. 21, p. 31, Ă la n. 40, p. 72 oĂč il faut lire § 29 » au lieu de § 9 », Ă la p. 225 non dans les marges de lâEnfer » au lieu de dans les marges de lâEnfer », Ă la p. 334 son disciple ĂlisĂ©e » au lieu de son fils ». Parlant du fond de cet Enfer, lâUlysse de Dante nâest donc pas la simple version dramatique du personnage parodique mieux connu du public français, Calogrenant le chevalier ridicule â qui lui aussi cherch[ait] ce quâil ne [pouvait] trouver », qui lui aussi rĂ©clamait ou lâaventure ou les merveilles », qui lui-mĂȘme manqua de mourir noyĂ©, alors quâil Ă©tait non pas en mer mais Ă cheval, dans la tempĂȘte par laquelle ChrĂ©tien de Troyes sâamuse Ă le punir. Contrairement Ă lui, si lâUlysse de Dante est sublimement grand, câest que, substituant la question de lâhĂ©roĂŻsme Ă celle du salut, il soumet la vie Ă une discipline plus quâĂ une justification â dâoĂč vient la forme dĂ©sintĂ©ressĂ©e du dĂ©sir, du gran disio qui est Ă©galement grand mĂ©pris. Ne plus ultra montre le tragique de cette grandeur. Qui ne tirerait profit Ă suivre son auteur dans lâexamen de ce tragique quâil mĂšne avec tant dâintelligence et de culture ? Karim Oukaci, Lâoeil de Minerve. * LâUlysse de Dante France Culture, Les Nouveaux chemins de la connaissance, Avec AdĂšle Van Reth et Didier Ottaviani, MaĂźtre de confĂ©rences Ă lâĂcole Normale SupĂ©rieure de Lyon, auteur de La philosophie de la lumiĂšre chez Dante. Du Convivio Ă la Divine comĂ©die, HonorĂ© Champion, Paris, 2004. LâĂ©mission commence par la lecture des vers 43 Ă 75 du Chant V de lâEnfer, dans la traduction de Jacqueline Risset Flammarion 1985, p. 241-243. RĂ©fĂ©rences musicales Henrik Bjorrk, VoidumAnonyme, Ciaccona di paradiso e dell infernoLightwave, Glissement dâĂmeAC/DC, Highway to Hell Lectures Dante, La Divine ComĂ©die , LâEnfer , Chant XXVI, vers 91-120BorgĂšs, Franz Liszt, AprĂšs une lecture du Dante Fantasia quasi sonataSaint Augustin Sergio Balestracci, Passo et mezzo Extrait Adaptation France Culture de La divine comĂ©die avec Alain Cuny et Yves Furet 6 juin 1958. * A propos de lâUlysse de Dante Le lecteur se souvient-il de ce passage du Coeur Absolu 1987 ? â Je casse trois jugements de la ComĂ©die, Mex. Le premier, bien sĂ»r Ăpicure. Le deuxiĂšme consiste Ă sâĂȘtre dĂ©barrassĂ© trop facilement dâHomĂšre au profit de Virgile, cette plate contrefaçon latine. Je prends donc le parti AchĂ©en contre le parti Troyen de la fondation de Rome. Vous vous rappelez quâUlysse est dĂ©crit par Dante comme sâenvolant de chez CircĂ© jusquâĂ un naufrage en pleine mer en vue du Paradis terrestre⊠Du coup, tout le retour Ă Ithaque est Ă©liminĂ©, la question pĂšre-fils, la question PĂ©nĂ©lope, le massacre lĂ©gitime des prĂ©tendants, le rĂŽle dĂ©terminant dâAthĂ©na. Que Dante ait eu des reproches sanglants Ă faire Ă Gemma, sa femme, bien, mais lĂ , quand mĂȘme, il pousse le bouchon trop loin. Il faut attendre le XXe siĂšcle pour assister Ă la rĂ©surrection dâHomĂšre », selon la belle expression de BĂ©rard, un charmant Français, soit dit en passant. Avant, il est pris en otage, mythologisĂ©, flouĂ©, dispersĂ©, divisĂ©, anonymisĂ©, surtout par la philologie allemande⊠Vous me suivez ?â Pfuitt ! fait la boule.â Donc, le grec. On sort Ăpicure, Ulysse et HomĂšre de lâEnfer, on les met au Paradis⊠Philippe Sollers, Le Coeur Absolu, 1987, Folio 2013, p. 125. Mais câest une autre histoire, un autre voyage, une autre expĂ©rience intĂ©rieure... dont Sollers pourrait parler le 5 octobre 2016 lors dâune confĂ©rence de la SociĂ©tĂ© Dantesque de France voir ici. LIRE Dante au paradisĂCOUTER, VOIR Monteverdi, Il ritorno dâUlisse in patria * Le pĂ©chĂ© sublime de Francesca et Paolo Chant V de la Divine ComĂ©die DeuxiĂšme confĂ©rence de la SociĂ©tĂ© Dantesque de France, avec Jean-Louis Poirier, ancien Professeur de KhĂągne, 15 juin 2016, Salle des Actes, Sorbonne. Introduction du prof. Vincent Carraud et du prof. Bruno Pinchard. * Rodin, Paolo et Francesca. c. 1887-89 Bronze. x x cm. Zoom cliquez lâimage. LâEnfer. Chant V Je descendis ainsi du premier cercledans le second, qui enclĂŽt moins dâespace,mais la douleur plus poignante, et plus de [16] sây tient, horriblement, et grogne il examine les fautes, Ă lâarrivĂ©e,juge et bannit suivant les que quand lâĂąme mal nĂ©evient devant lui, elle se confesse toute et ce connaisseur de pĂ©chĂ©svoit quel lieu lui convient dans lâenfer ;de sa queue il sâentoure autant de foisquâil veut que de degrĂ©s lâĂąme se pressent en foule devant lui,et vont lâune aprĂšs lâautre au jugement elles parlent, entendent et tombent."O toi qui viens Ă lâhospice de douleur",me dit Minos quand il me vit,en oubliant de remplir son office,"vois comme tu entres, et Ă qui tu te fies ;que lâampleur de lâentrĂ©e ne tâabuse !"Alors mon guide "Pourquoi cries-tu ?NâempĂȘche pas son voyage fatal on veut ainsi lĂ oĂč on peutce que lâon veut, et ne demande pas davantage."A prĂ©sent commencent les notes douloureusesĂ se faire entendre ; Ă prĂ©sent je suis venulĂ oĂč les pleurs me vins en un lieu oĂč la lumiĂšre se tait,mugissant comme mer en tempĂȘte,quand elle est battue par vents tourmente infernale, qui nâa pas de repos,mĂšne les ombres avec sa rage ;et les tourne et les heurte et les elles arrivent devant la ruine,lĂ sont les cris, les pleurs, les plaintes ;lĂ elles blasphĂšment la vertu je compris quâun tel tourmentĂ©tait le sort des pĂ©cheurs charnels,qui soumettent la raison aux comme leurs ailes portent les Ă©tourneaux,dans le temps froid, en vol nombreux,ainsi ce souffle mĂšne, de çà de lĂ ,de haut en bas, les esprits mauvais ;aucun espoir ne les confortedâaucun repos, et mĂȘme de moindre comme les grues vont chantant leurs complaintes,en formant dans lâair une longue ligne,ainsi je vis venir, poussant des cris,les ombres portĂ©es par ce grand vent ;alors je dis "MaĂźtre qui sont ceux-lĂ qui sont ainsi chĂątiĂ©s par lâair noir ?""La premiĂšre de ceux dont tu voudraissavoir quelque nouvelle", me dit-il alors,"fut impĂ©ratrice de nombreux langages ;au vice de luxure elle fut si rouĂ©equâelle fit dans sa loi la licence licite,afin dâĂŽter le blĂąme oĂč elle Ă©tait est SĂ©miramis [17], dont on peut lirequâelle fut lâĂ©pouse de Ninus, et puis lui succĂ©da elle tint la terre que le Sultan suivante est celle-ci qui se tua par amour [18]en trahissant les cendres de SichĂ©e ;puis vient la luxurieuse ClĂ©opĂątre [19].Tu vois HĂ©lĂšne [20], par qui advintun si long malheur ; tu vois le grand Achille [21],qui combattit Ă la fin contre vois PĂąris, Tristan" ; ainsi il mâen montraet mâen dĂ©signa du doigt plus de millequâamour ĂŽta de notre jâeus ainsi entendu mon docteurnommer les dames de jadis et les cavaliers,pitiĂ© me prit, et je devins comme commençai "PoĂšte, volontiersje parlerais Ă ces deux-ci [22] qui vont ensemble,et qui semblent si lĂ©gers dans le vent."Et lui Ă moi "Tu les verras quand il serontplus prĂšs de nous ; alors prie-lespar lâamour qui les mĂšne, et ils viendront."DĂšs que le vent vers nous les plie,je leur dis ces mots "O Ăąmes tourmentĂ©es,venez nous parler, si nul ne le dĂ©fend."Comme colombes Ă lâappel du dĂ©sirviennent par lâair, les ailes droites et fixes,vers le doux nid, portĂ©es par le vouloir ;ainsi de la compagnie de Didonils sâĂ©loignĂšrent, venant vers nous dans lâair malin,si fort fut mon cri affectueux."O crĂ©ature gracieuse et bienveillantequi viens nous visiter par lâair sombrenous dont le sang teignit la terre,si le roi de lâunivers Ă©tait notre ami,nous le prerions pour ton bonheur,puisque tu as pitiĂ© de notre mal tout ce quâil vous plaĂźt dâentendre et de dire,nous entendrons et nous vous parlerons,tandis que le vent, comme il fait, sâ terre oĂč je suis nĂ©e se trouve au bordde ce rivage oĂč le PĂŽ vient descendrepour ĂȘtre en paix avec ses qui sâapprend vite au cĆur gentil,prit celui-ci de la belle personneque jâĂ©tais ; et la maniĂšre me touche qui force tout aimĂ© Ă aimer en retour,me prit si fort de la douceur de celui-cique, comme tu vois, il ne me laisse nous a conduits Ă une mort CaĂŻne [23] attend celui qui nous tua."Tels furent les mots que nous eĂ»mes dâ jâentendis ces Ăąmes blessĂ©es,je baissai le visage, et le gardai si basque le poĂšte me dit "Que penses-tu ?"Quand je lui rĂ©pondis, je commençai "HĂ©las,que de douces pensĂ©es, et quel dĂ©sirles ont menĂ©s ou douloureux trĂ©pas !"Puis je me retournai vers eux et je leur dispour commencer "Francesca, tes martyresme font triste et pieux Ă dis-moi ; du temps des doux soupirs,Ă quel signe et comment permit amourque vous connaissiez vos incertains dĂ©sirs ?"Et elle "Il nâest pas de plus grande douleurque de se souvenir des temps heureuxdans la misĂšre ; et ton docteur le si tu as telle envie de connaĂźtrela racine premiĂšre de notre amour,je ferai comme qui pleure et parle Ă la lisions un jour par agrĂ©mentde Lancelot [24], comment amour le prit nous Ă©tions seuls et sans aucun fois la lecture nous fit lever les yeuxet dĂ©colora nos visages ;mais un seul point fut ce qui nous nous vĂźmes le rire dĂ©sirĂ©ĂȘtre baisĂ© par tel amant,celui-ci, qui jamais plus ne sera loin de moi,me baisa la bouche tout [25] fut le livre et celui qui le fit ;ce jour-lĂ nous ne lĂ»mes pas plus avant."Pendant que lâun des deux esprits parlait ainsi,lâautre pleurait, si bien que de pitiĂ©je mâĂ©vanouis comme si je mourais ;et je tombai comme tombe un corps mort. CosĂŹ discesi del cerchio primaio giĂč nel secondo, che men loco cinghia, e tanto piĂč dolor, che punge a guaio. Stavvi MinĂČs orribilmente, e ringhia essamina le colpe ne lâintrata ; giudica e manda secondo châavvinghia. Dico che quando lâanima mal nata li vien dinanzi, tutta si confessa ; e quel conoscitor de le peccata vede qual loco dâinferno Ăš da essa ; cignesi con la coda tante volte quantunque gradi vuol che giĂč sia messa. Sempre dinanzi a lui ne stanno molte ; vanno a vicenda ciascuna al giudizio ;dicono e odono, e poi son giĂč volte. O tu che vieni al doloroso ospizio », disse MinĂČs a me quando mi vide, lasciando lâatto di cotanto offizio, guarda comâentri e di cui tu ti fide ; non tâinganni lâampiezza de lâintrare ! ». E âl duca mio a lui PerchĂ© pur gride ? Non impedir lo suo fatale andare vuolsi cosĂŹ colĂ dove si puote ciĂČ che si vuole, e piĂč non dimandare ». Or incomincian le dolenti note a farmisi sentire ; or son venuto lĂ dove molto pianto mi percuote. Io venni in loco dâogne luce muto, che mugghia come fa mar per tempesta, se da contrari venti Ăš combattuto. La bufera infernal, che mai non resta, mena li spirti con la sua rapina ; voltando e percotendo li molesta. Quando giungon davanti a la ruina, quivi le strida, il compianto, il lamento ; bestemmian quivi la virtĂč divina. Intesi châa cosĂŹ fatto tormento enno dannati i peccator carnali, che la ragion sommettono al talento. E come li stornei ne portan lâali nel freddo tempo, a schiera larga e piena, cosĂŹ quel fiato li spiriti mali ; di qua, di lĂ , di giĂč, di sĂč li mena ; nulla speranza li conforta mai, non che di posa, ma di minor pena. E come i gru van cantando lor lai, faccendo in aere di sĂ© lunga riga, cosĂŹ vidâio venir, traendo guai, ombre portate da la detta briga ; per châiâ dissi Maestro, chi son quelle genti che lâaura nera sĂŹ gastiga ? ». La prima di color di cui novelle tu vuoâ saper », mi disse quelli allotta, fu imperadrice di molte favelle. A vizio di lussuria fu sĂŹ rotta, che libito fĂ© licito in sua legge, per tĂČrre il biasmo in che era condotta. EllâĂš SemiramĂŹs, di cui si legge che succedette a Nino e fu sua sposa tenne la terra che âl Soldan corregge. Lâaltra Ăš colei che sâancise amorosa, e ruppe fede al cener di Sicheo ; poi Ăš CleopatrĂ s lussuriosa. Elena vedi, per cui tanto reo tempo si volse, e vedi âl grande Achille, che con amore al fine combatteo. Vedi ParĂŹs, Tristano » ; e piĂč di mille ombre mostrommi e nominommi a dito, châamor di nostra vita dipartille. Poscia châio ebbi il mio dottore udito nomar le donne antiche e â cavalieri, pietĂ mi giunse, e fui quasi smarrito. Iâ cominciai Poeta, volontieri parlerei a quei due che ânsieme vanno, e paion sĂŹ al vento esser leggeri ». Ed elli a me Vedrai quando saranno piĂč presso a noi ; e tu allor li priega per quello amor che i mena, ed ei verranno ». SĂŹ tosto come il vento a noi li piega, mossi la voce O anime affannate, venite a noi parlar, sâaltri nol niega ! ». Quali colombe dal disio chiamate con lâali alzate e ferme al dolce nido vegnon per lâaere dal voler portate ; cotali uscir de la schiera ovâĂš Dido, a noi venendo per lâaere maligno, sĂŹ forte fu lâaffettuoso grido. O animal grazioso e benigno che visitando vai per lâaere perso noi che tignemmo il mondo di sanguigno, se fosse amico il re de lâuniverso, noi pregheremmo lui de la tua pace, poi câhai pietĂ del nostro mal perverso. Di quel che udire e che parlar vi piace, noi udiremo e parleremo a voi, mentre che âl vento, come fa, ci tace. Siede la terra dove nata fui su la marina dove âl Po discende per aver pace coâ seguaci sui. Amor, châal cor gentil ratto sâapprende prese costui de la bella persona che mi fu tolta ; e âl modo ancor mâoffende. Amor, châa nullo amato amar perdona, mi prese del costui piacer sĂŹ forte, che, come vedi, ancor non mâabbandona. Amor condusse noi ad una morte Caina attende chi a vita ci spense ». Queste parole da lor ci fuor porte. Quandâio intesi quellâanime offense, chinaâ il viso e tanto il tenni basso, fin che âl poeta mi disse Che pense ? ». Quando rispuosi, cominciai Oh lasso, quanti dolci pensier, quanto disio menĂČ costoro al doloroso passo ! ». Poi mi rivolsi a loro e parlaâ io, e cominciai Francesca, i tuoi martĂŹri a lagrimar mi fanno tristo e pio. Ma dimmi al tempo dâi dolci sospiri, a che e come concedette Amore che conosceste i dubbiosi disiri ? ». E quella a me Nessun maggior dolore che ricordarsi del tempo felice ne la miseria ; e ciĂČ sa âl tuo dottore. Ma sâa conoscer la prima radice del nostro amor tu hai cotanto affetto, dirĂČ come colui che piange e dice. Noi leggiavamo un giorno per diletto di Lancialotto come amor lo strinse ; soli eravamo e sanza alcun sospetto. Per piĂč fiate li occhi ci sospinse quella lettura, e scolorocci il viso ; ma solo un punto fu quel che ci vinse. Quando leggemmo il disiato riso esser basciato da cotanto amante, questi, che mai da me non fia diviso, la bocca mi basciĂČ tutto tremante. Galeotto fu âl libro e chi lo scrisse quel giorno piĂč non vi leggemmo avante ». Mentre che lâuno spirto questo disse, lâaltro piangea ; sĂŹ che di pietade io venni men cosĂŹ comâio morisse. E caddi come corpo morto cade. Dante, LâEnfer, traduction Jacqueline Risset, Flammarion, 1985, p. 61-67. Rodin, Le baiser ou Paolo et Francesca. 1881-82. Groupe en terre cuite. MusĂ©e Rodin. Photo 24 septembre 2016. Zoom cliquez lâimage. [1] Cette abondance et cet enchevĂȘtrement de lĂ©gendes se rapportant Ă la mort dâUlysse, joints Ă lâabsence de toute indication claire donnĂ©e par HomĂšre, Ă©taient la source de dĂ©veloppements notables dans la tradition originale » » William Bedell Stanford, The Ulysses Theme, p. 89.[2] Ibid.[3] Rappelons que Dante connaissait les poĂšmes homĂ©riques Ă travers vraisemblablement BenoĂźt de Sainte-Maure, ou des traditions encore moins fiables.[4] On ne sâattendait guĂšre / De voir Ulysse en cette affaire » Jean DE LA FONTAINE. La tortue et les deux canards, dans Fables, X, 2. La Fontaine connaissait-il Dante ? Par lâintermĂ©diaire de Boccace, câest possible. En revanche, il avait Ă©videmment lu Lucien de Samosate. Quelques fables, en tout cas, Ă©voquent un dĂ©sir comparable Ă celui dâUlysse, et pour le condamner, conformĂ©ment Ă la problĂ©matique Ă©picurienne. Voir par exemple Les deux pigeons XII, 1, ou Le rat et lâhuĂźtre VIII, 9 ; au sujet de cette derniĂšre fable, voir plus haut, p. 175, note 121.[5] LUCIEN, Histoire vĂ©ritable, dans Romans grecs et latins, Ă©d. et trad. Pierre Grimal, Paris, Gallimard, coll. BibliothĂšque de la PlĂ©iade », 1958, p. 1346-1349.[6] Ibid., p. 1346.[7] Ainsi lit-on dans lâHistoire vĂ©ritable, op. cit., p. 1346 s. [âŠ] partant des colonnes dâHercule, le cap Ă lâouest, vers lâOcĂ©an, je mâembarquai, par un vent favorable. La cause de mon voyage et son intention Ă©taient lâactivitĂ© de mon esprit et mon dĂ©sir de choses nouvelles, ainsi que la volontĂ© de savoir oĂč sâarrĂȘtait lâOcĂ©an et quels Ă©taient les hommes qui habitaient sur lâautre rive. [âŠ] Nous nous abandonnĂąmes donc au vent [âŠ] et nous allĂąmes ainsi pendant soixante-dixâneuf jours. Le quatreâvingtiĂšme, le soleil se montra brusquement et nous vĂźmes, Ă quelque distance, une Ăźle Ă©levĂ©e et boisĂ©e, entourĂ©e dâune barre assez faible [âŠ] soudain, un tourbillon se forma, fit tournoyer le navire, le souleva Ă une hauteur dâenviron trois cents stades et le maintint en lâair, sans le laisser retomber sur la mer [âŠ] » Cf. Enfer, XXV I, 97-142. Nous avons dĂ©jĂ Ă©voquĂ© ce passage, plus haut, p. 48, note 71, Ă propos du vol fou » dâUlysse.[8] Avec Tennyson, notamment, et quelques autres. En particulier, lâimage, devenue si commune, dâun Ulysse romantique, capable de parler avec force Ă une sensibilitĂ© moderne, est vraisemblablement due Ă Francesco De Sanctis Lezioni e saggi su Dante, corsi torinesi, zurighesi e saggi critici, Turin, Giulio Einaudi editore, 1967 et Ă Benedetto Croce La poesia di Dante, chap. VI ModernitĂ© de Dante », op. cit., p. 168 s.. Une telle lecture, ouverte et libĂ©rĂ©e, a cependant un prix Ă payer qui est la perte de la dimension allĂ©gorique du poĂšme. Pour cette raison, Charles S. Singleton Journey to Beatrice, op. cit., p. v sâen prend Ă Benedetto Croce. Sur la rĂ©cupĂ©ration » de lâUlysse de Dante par un certain nombre de philosophes rĂ©cents Ernst Bloch, Adorno, Horkheimer, Levinas, voir lâexposĂ© trĂšs complet de Ruedi IMBACH, Dante, la philosophie et les laĂŻcs, chap. VIII Ulysse, figure de philosophe », op. cit., p. 215 s.[9] Enfer, XXVI, 142 jusquâĂ ce que lâocĂ©an fut par-dessus nous refermĂ© ».[10] Tel est le titre dâun entretien de Primo Levi avec Walter Mauro, recueilli Ă lâoccasion de la parution de Se non ora quando ? et paru dans Il Mattino du 22 mai 1982 citĂ© dans Primo LEVI, Ćuvres, Paris, Robert Laffont, 2005, p. 1000. Primo Levi y parle du thĂšme du voyage Le voyage est quelque chose de plus câest le dĂ©part et lâarrivĂ©e, lâalpha et lâomega de la vie, lâimprĂ©vu et lâĂ©trange qui donnent un sens Ă la vie, lâoccasion de faire des rencontres, de se âmesurerâ [...]. » Le voyage, qui fait le thĂšme de Maintenant ou jamais, mais qui supporte Ă©galement tout le rĂ©cit, toute la dramatisation de La TrĂȘve, dans la mesure oĂč il est plus quâessentiellement, dans ces deux exemples, voyage de retour, prend Ă©videmment un caractĂšre odyssĂ©en. Il est par suite naturel que sây attache⊠un certain nombre de rĂ©flexions sur la mĂ©moire, lâĂ©criture et la transmission. Voir plus bas, ch. V, 3.[11] Lettre XIII, Ă Cangrande della Scala. par. 33.[12] Cf. Enfer, XVIII, 82s.[13] Nâoublions pas que, dans lâautre monde, dont la loi est la justice divine, chacune des Ăąmes est reprĂ©sentĂ©e telle quâen elle-mĂȘme lâĂ©ternitĂ© lâexplique.[14] Cf. François HARTOG, MĂ©moire dâUlysse, p. 94.[15] Enfer, V, 73s.[16] Minos dans la mythologie classique, roi de CrĂšte cĂ©lĂšbre pour sa sĂ©vĂ©ritĂ© et son sens de la justice. HomĂšre le place dans lâHadĂšs comme juge des Ames ; Dantes le reprend Ă travers Virgile, et en fait un dĂ©mon infernal.[17] SĂ©miramis reine mythique de ChaldĂ©e et dâAssyrie, aux XIVe siĂšcle avant JĂ©sus-Christ ; cĂ©lĂšbre par sa beautĂ© et ses excĂšs sexuels, elle aurait selon Orose promulguĂ© une loi autorisant lâinceste.[18] Celle-ci qui se tua par amour / en trahissant les cendres de SichĂ©e Didon, reine de Carthage, dont Virgile raconte quâelle se tua lorsquâelle fut abandonnĂ©e par EnĂ©e, trahissant par cet amour la promesse de fidĂ©litĂ© Ă son mari dĂ©funt, SichĂ©e.[19] ClĂ©opĂątre la reine dâEgypte, maĂźtresse de CĂ©sar puis dâAntoine, exemple traditionnel de luxure.[20] HĂ©lĂšne cause de la guerre de Troie.[21] Achille dâaprĂšs les lĂ©gendes mĂ©diĂ©vales sur la guerre de Troie, Ă cause de son amour pour PolyxĂšne, il fut attirĂ© dans un piĂšge et tuĂ© par traĂźtrise.[22] ces deux-ci fait divers devenu lĂ©gende. Francesca da Rimini, fille de Guido da Polenta, Ă©pouse Giovanni Malatesta en 1275 ; sâĂ©prend de son beau-frĂšre Paolo da Malatesta ; Giovanni les surprend et les tue.[23] la CaĂŻne câest la premiĂšre des quatre rĂ©gions du dernier cercle de lâEnfer, le Cocyte. Elle est assignĂ©e aux damnĂ©s traĂźtres Ă leurs parents.[24] Lancelot diffĂ©rentes version des romans de la Table Ronde racontent ses amours avec GeniĂšvre, femme du roi Arthur.[25] Galehaut sĂ©nĂ©chal de la reine, tĂ©moin dâun pacte dâamour. Dans les textes connus, il pousse GeniĂšvre Ă embrasser Lancelot. Selon la version inconnue que suit Dante ou suivant sa propre version câest Lancelot qui embrasse GeniĂšvre.
LeParti pris des choses. NRP CollĂšge n°631-2. Ătudier des poĂšmes de Francis Ponge en classe de 3e permet dâaborder la question du matĂ©riau littĂ©raire quâest le mot, mais aussi dâouvrir le cours Ă la pratique de «diverses formes dâexpression Ă visĂ©e littĂ©raire ou/et Ă visĂ©e artistique ». Dans la lignĂ©e de Francis Ponge
RĂ©servĂ© aux abonnĂ©s PubliĂ© le 12/05/2020 Ă 1557, Mis Ă jour le 12/05/2020 Ă 1557 Francis Ponge, en fĂ©vrier 1977. Sophie Bassouls/©Sophie Bassouls/Leemage Dans son recueil, paru en 1942, le poĂšte sâinspire du quotidien dont les Ă©lĂ©ments, souvent familiers, sont dĂ©libĂ©rĂ©ment choisis pour leur apparente banalitĂ©. La poĂ©sie du quotidienSi jâai choisi de parler de la coccinelle, câest par dĂ©goĂ»t des idĂ©es», Ă©crit Ponge en 1943. Ă rebours des poĂštes idĂ©alistes qui tapissent leur intĂ©rioritĂ© de paysages romantiques, lâauteur prĂȘche pour une prose rĂ©aliste. Ni subjectivitĂ©, ni lyrisme. Ce qui intĂ©resse Ponge, câest lâici et le maintenant, le dĂ©tail des choses familiĂšres. Si lâon peut ĂȘtre surpris en lisant un texte sur un morceau de viande», il ne faut pas voir dans le trivial un territoire Ă©tranger Ă la matiĂšre verbale. Les mots comme les choses quâils dĂ©signent, ont une chair, un goĂ»t et une couleur. Il y a dans Le Parti pris une dĂ©prise, une dĂ©saffection Ă lâĂ©gard du casse-tĂȘte mĂ©taphysique», expliqua-t-il. Est-ce pour cela que Ponge fait de son corps une Ă©ponge? Ses yeux se baladent avec la pluie» quand ses doigts dĂ©fient lâhuĂźtre» de les couper. Lâauteur rĂ©invente les objets du quotidien par la grĂące dâhistoriettes qui confinent parfois Ă la dĂ©finition, voire la câest mentir Cet article est rĂ©servĂ© aux abonnĂ©s. Il vous reste 65% Ă sa libertĂ©, câest cultiver sa Ă lire votre article pour 0,99⏠le premier mois DĂ©jĂ abonnĂ© ? Connectez-vousMartinChuzzlewit ou Vie et aventures de Martin Chuzzlewit [1] (titre original en anglais : The Life and Adventures of Martin Chuzzlewit) est un roman de Charles Dickens, le dernier de sa sĂ©rie dite « picaresque » [N 1], [2], paru en 1844.. Dickens le considĂšre comme son meilleur roman ; pourtant, le livre, bien quâoffrant de multiples rebondissements, ne connaĂźt pas la grande faveur
___L'huĂźtre, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence plus rugueuse, d'une couleur moins unie, brillamment blanchĂątre. C'est un monde opiniĂątrement clos. Pourtant on peut l'ouvrir il faut alors la tenir au creux d'un torchon, se servir d'un couteau Ă©brĂ©chĂ© et peu franc, s'y reprendre Ă plusieurs fois. Les doigts curieux s'y coupent, s'y cassent les ongles c'est un travail grossier. Les coups qu'on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d'une sorte de l'intĂ©rieur l'on trouve tout un monde, Ă boire et Ă manger sous un firmament Ă proprement parler de nacre, les cieux d'en dessus s'affaissent sur les cieux d'en dessous, pour ne plus former qu'une mare, un sachet visqueux et verdĂątre, qui flue et reflue Ă l'odeur et Ă la vue, frangĂ© d'une dentelle noirĂątre sur les trĂšs rare une formule perle Ă leur gosier de nacre, d'oĂč l'on trouve aussitĂŽt Ă s' Ponge, Le Parti pris des choses, L'auteur 1899-1988 Francis Ponge est nĂ© en 1899 Ă Montpellier hĂ©hĂ©.Il fait ses Ă©tudes Ă Caen. En 1918, il est reçu au baccalaurĂ©at de droit mais ne parvient Ă obtenir ni sa licence de philosophie ni son entrĂ©e Ă l'Ecole 1940, pendant la 2Ăšme Guerre Mondiale, il entre dans la RĂ©sistance, et sera renommĂ©e va croĂźtre grĂące Ă Sartre et Philippe va ĂȘtre traduit en plusieurs langues et donnera des tas de 1981, il reçoit le Prix national de meurt en Parti pris des choses est un recueil de poĂšmes en prose paru en Parti pris des = il prend aux objets = ce recueil, Ponge dĂ©crit des "choses", des objets banals, quotidiens. Il refuse le lyrisme, et l'utilisation d'un langage artificiel. La poĂ©sie doit venir de l'objet dĂ©crit, elle ne doit pas ĂȘtre toute prĂȘte Ă se poser sur l'objet. C'est en regardant l'objet qu'elle vient, Le texte Le commentaire ___I__Une Ă©criture apparemment cette impression est accentuĂ©e par le choix du poĂšme en prose au lieu de la poĂ©sie description organisĂ©e en trois construit en 3 temps = 3 certaine 1er paragraphe une description extĂ©rieure de l'huĂźtre d'une apparence » 2Ăšme paragraphe on passe Ă une description plus prĂ©cise et plus intĂ©rieure Ă l'intĂ©rieur » 3Ăšme paragraphe description d'un Ă©lĂ©ment plus particulier Ă l'intĂ©rieur de cette huĂźtre = la perle. La ____..particularitĂ© de cette description est marquĂ©e par les 1ers mots parfois trĂšs rare » â ça n'arrive ____..pas Et cette progression de l'extĂ©rieur vers l'intĂ©rieur, du gĂ©nĂ©ral au particulier, se marque aussi par une ____..Ă©volution de la forme des paragraphes ils sont de plus en plus courts, puisqu'on focalise sur des ____..Ă©lĂ©ments de plus en plus prĂ©cis. En outre, le 1er paragraphe est constituĂ© de plusieurs phrases 5, le ____..2Ăšme est une seule longue phrase, et le 3Ăšme est une phrase beaucoup plus de l'huĂźtre = la Elle est d'emblĂ©e comparĂ©e Ă un galet » un minĂ©ral connotant cette idĂ©e de soliditĂ©, de longĂ©vitĂ©, ____..idĂ©e qui sera renforcĂ©e par l'expression opiniĂątrement clos » l'adverbe renforce l'impression de ____..soliditĂ© de cette fermeture elle est bien fermĂ©e.___â On insiste sur la difficultĂ© pour venir Ă bout de l'huĂźtre, pour l'ouvrir ______â La difficultĂ© est dĂ©jĂ mise en Ă©vidence par l' apparence plus rugueuse » c'est dĂ©sagrĂ©able au _______..toucher, il est difficile de s'en La solution pour l'ouvrir = une solution en trois temps, comme s'il fallait respecter Ă la lettre trois _______..Ă©tapes cf. rythme ternaire marquĂ© par les virgules En outre, il faut s'y reprendre Ă plusieurs _______..fois ».______â Il faut utiliser des instruments un torchon » puis un couteau Ă©brĂ©chĂ© » un couteau Ă dents = _______..une arme !.______â Impression de violence renforcĂ©e il faut la tenir au creux » = il ne faut pas faire n'importe _______..comment, il faut bien l'avoir en main, ne pas la laisser filer ; avec un couteau Ă©brĂ©chĂ© » = le _______..couteau est dĂ©jĂ dangereux Ă lui seul, mais il ne suffit pas, il faut une lame Ă©brĂ©chĂ©e qui est encore _______..plus tranchante ; et on est obligĂ© de porter des coups » qui vont abĂźmer l'huĂźtre, lui laisser des _______..marques marquent son enveloppe de ronds blancs » Ce processus est qualifiĂ© de travail _______..grossier » car on a du mal Ă l'ouvrir, on tape un peu partout quand on n'a pas la bonne _______..technique â il faut y aller fortement pour qu'elle Et l'huĂźtre ne se laissera pas faire, elle va rĂ©sister elle fait de la rĂ©sistance les doigts curieux s'y _______..coupent, s'y cassent les ongles » deux verbes exprimant une violence renforcĂ©e par _______..l'allitĂ©ration en [k] = elle se intĂ©rieur rempli d'Ă©lĂ©ments hĂ©tĂ©roclites = en tous genres.Une certaine indistinction dans ce que l'on trouve Ă l'intĂ©rieur ___ DĂ©jĂ le fait que cette description ne soit constituĂ©e que d'une seule phrase Ă 10 avec beaucoup de ____..juxtapositions insiste sur une sorte de difficultĂ© pour dĂ©finir ce dont il s' La 1Ăšre expression tout un monde » est renforcĂ©e par Ă boire et Ă manger » qui, au sens propre, ____..signifie qu'il y a de l'eau et un fruit de mer, et au sens figurĂ© qu'il y a toutes sortes de On Ă©numĂšre des Ă©lĂ©ments appartenant Ă des rĂ©alitĂ©s diverses les cieux » = l'air, une mare » = ____..l'eau, le sachet » fait davantage rĂ©fĂ©rence Ă une fonction on peut mettre des choses dedans, la ____..dentelle » = une matiĂšre de tissu, d'autant plus qu'elle est frangĂ©e » = des fils pendent = reprĂ©sentation ____..trĂšs Certaines expressions mettent en Ă©vidence le cĂŽtĂ© insaisissable de certains Ă©lĂ©ments ______â les cieux d'en-dessus s'affaissent sur les cieux d'en-dessous » il devient difficile de _______..distinguer lequel est lequel, tout se qui flue et reflue Ă l'odeur et Ă la vue » expression d'une mobilitĂ© qu'aucun sens se semble _______..en mesure de fixer, ni l'odorat ni la perle = beautĂ© et beautĂ© perle », nacre » = l'intĂ©rieur de l'huĂźtre, orner » = fonction raretĂ© trĂšs rare » superlatif, formule » = petite forme ce n'est pas dĂ©marche apparemment objective de objet ».___âȘ Certaines formulations que l'on pourrait retrouver dans un article de dictionnaire ______â On Ă©nonce d'emblĂ©e ce dont on va parler l'huĂźtre » = 1er Les deux premiers verbes = verbe ĂȘtre » il s'agit de dĂ©terminer une identitĂ©, de dĂ©finir c'est » _______..est l'Ă©quivalent d'un Ă©gal.______â On trouve des Ă©lĂ©ments propres Ă une dĂ©finition la taille grosseur », la couleur blanchĂątre » _______.. blancs » verdĂątres » noirĂątre » la consistance rugueuse » visqueux » _______.. la matiĂšre nacre » c'est un Ă©lĂ©ment que l'on retrouverait dans n'importe quelle dĂ©finition _______..d'une huĂźtre, tout comme la prĂ©sence d'une perle, de mĂȘme pour Ă boire et Ă manger » qui signifie _______..qu'elle est comestible.___âȘ L'Ă©nonciation semble aussi chercher une certaine objectivitĂ© ______â Recours constant Ă l'impersonnel on peut » on trouve » qui est beaucoup plus _______..gĂ©nĂ©ralisant qu'une 1Ăšre personne du pluriel par exemple la formulation on trouve » est typique _______..d'un texte descriptif.______â Ou bien on trouve des formulations qui rappellent un mode d'emploi, une notice explicative il faut _______..alors la tenir ..., se servir d'un couteau ... » un peu comme une recette de cuisine._____3__Une recherche du dĂ©tail.â> Une certaine prĂ©cision au creux d'un torchon », couteau Ă©brĂ©chĂ© », marquent son enveloppe de ___ronds blancs », sachet visqueux et verdĂątre ».______â Les adverbes accompagnent les adjectifs pour mieux les prĂ©ciser brillamment blanchĂątre », _______.. opiniĂątrement clos ».______â Recours Ă des comparatifs de supĂ©rioritĂ© ou d'infĂ©rioritĂ© plus rugueuse », moins unie », _______..comme pour introduire une donnĂ©e mathĂ©matique.â> Et une description qui fait appel aux diffĂ©rents sens pour permettre au lecteur de se reprĂ©senter au mieux ___l'objet dont il est question ______â La vue grosseur », couleur », brillamment », blanchĂątre », ronds blancs », vue » Le toucher rugueuse », Ă©brĂ©chĂ© », visqueux ».______â Le goĂ»t Ă boire et Ă manger ».______â L'odorat odeur ».______â Et dans une certaine mesure, connotation Ă l'ouĂŻe parler » gosier » Toutefois ces prĂ©cisions semblent souvent approximatives cf. rĂ©currence du suffixe âĂątre » dans __.. blanchĂątre », verdĂątre »... ou encore une sorte de halos » un texte qui prĂ©sente toutefois les caractĂ©ristiques d'un dissocie le fond de la forme mais ça va avec la problĂ©matique Peut-on parler de poĂ©sie ? car les procĂ©dĂ©s que nous allons Ă©voquer sont typiques de la jeux de sonoritĂ©s malgrĂ© la prose.___⣠Des homĂ©otĂ©leutes noirĂątre », blanchĂątre », verdĂątre » qui fonctionnent un peu comme des ____.. Des jeux sur les allitĂ©rations et assonances ______â En [k] les doigts curieux s'y coupent, s'y cassent les ongles .... Les coups qu'on lui porte _______..marquent son enveloppe » En [r] parfois trĂšs rare une formule perle Ă leur gosier de nacre, d'oĂč l'on trouve aussitĂŽt Ă _______..s'orner » En [s] les cieux d'en-dessus s'affaissent sur les cieux d'en-dessous » En [v] et [f] visqueux et verdĂątre ..., flue et reflue Ă l'odeur et Ă la vue » + assonance en [u] _______..des labiovĂ©laires._____2__Des jeux sur le langage = les Sur la polysĂ©mie jeu entre les sens propre et figurĂ© ______â Ă boire et Ă manger » aspect comestible de l'huĂźtre / huĂźtre composĂ© d'Ă©lĂ©ments _______.. firmament ... de nacre » firmamentâ est un terme habituellement utilisĂ© en poĂ©sie, le _______..nacre » aussi pour exprimer la puretĂ© teint de nacre par exemple / mais ici cela fait rĂ©fĂ©rence Ă la _______..matiĂšre mĂȘme dont l'huĂźtre est constituĂ©e d'ailleurs le jeu sur le sens propre et le sens figurĂ© est _______..mis en Ă©vidence par l'expression Ă proprement parler » mise entre parenthĂšses c'est comme si _______..le poĂšte nous disait qu'il avait conscience d'utiliser un vocabulaire traditionnellement poĂ©tique, il _______..prĂ©cise car en gĂ©nĂ©ral il utilise le langage Une sorte d'oxymore brillamment blanchĂątre » le terme blanchĂątre » connote un cĂŽtĂ© Des personnifications c'est un monde opiniĂątrement clos » l'opiniĂątretĂ© = le fait de mettre de la ____..persĂ©vĂ©rance, de l'acharnement est une qualitĂ© humaine ; un couteau ... peu franc » connotation ____..morale d'une absence de franchise ; leur gosier de nacre » la On va mĂȘme jusqu'Ă la mĂ©tonymie les doigts curieux » pour dĂ©signer la personne qui tente, par ____..curiositĂ©, d'ouvrir l'huĂźtre avec ses mĂ©taphore filĂ©e entre l'huĂźtre et le On retrouve cette idĂ©e explicitement Ă deux reprises dans le poĂšme dans le 1er § = l'huĂźtre vue de _____l'extĂ©rieur c'est un monde » et dans le 2Ăšme § = l'intĂ©rieur de l'huĂźtre tout un monde » On note aussi la prĂ©sence de tout un vocabulaire qui se rattache Ă l'idĂ©e de monde, d'univers les _____halos » qui sont des aurĂ©oles autour des astres, le firmament » qui est la voĂ»te cĂ©leste, les cieux _____d'en-dessus [et] les cieux d'en-dessous ».___âŒ Ă l'intĂ©rieur de ce monde, on a une sorte de mer Ă©lĂ©ment aquatique aprĂšs Ă©lĂ©ments cĂ©lestes une _____mare », qui flue et reflue » cf. les mouvements de la marĂ©e, Ă l'odeur » peut renvoyer Ă l'odeur _____d'iode typique de la mer en mĂȘme temps l'huĂźtre vient de la mer..., sur les bords » les bords _____de mer....___⌠Un monde caractĂ©risĂ© oĂč tout Ă l'air de se mĂȘler ______â Les cieux » se mĂȘlent entre eux, puisqu'ils s'affaissent » les uns sur les Si bien que ces cieux se confondent en une mer, comme s'il n'y avait plus d'horizon pour ne plus _______..former qu'une mare ».______â Qui devient mĂȘme solide dans une certaine mesure puisqu'elle devient sachet ».______â Un mĂ©lange des couleurs le nacre » se mĂȘle au verdĂątre » et au noirĂątre ».______â Un monde en mouvement, insaisissable s'affaissent » mouvement vertical, flue et reflue _______..» mouvement horizontal, visqueux » renforce le cĂŽtĂ© insaisissable.â On a bien affaire Ă une transfiguration poĂ©tique du rĂ©el le rĂ©el est transformĂ© en poĂ©sie, dĂšs lors cette ___description devient symbolique du derniĂšre phrase = une chute une formule perle » formulation trĂšs 1er sens = une petite forme apparaĂźt comme une Mais c'est d'autant plus vrai que ce qui apparaĂźt est effectivement une perle le trĂ©sor de l'huĂźtre.______â Le terme formule » peut signifier une formulation, c'est-Ă -dire ce que l'on dit â or, ce qui _______..apparaitrait ce ne serait pas simplement une petite forme ou une perle, mais aussi une parole, ce _______..sens serait confirmĂ© par la prĂ©sence, juste aprĂšs, du terme gosier » appartenant au mĂȘme _______..champ lexical = partie intĂ©rieure de la gorge d'oĂč sort la Si on part de cette hypothĂšse, quelle serait cette parole ?______â Ses caractĂ©ristiques la raretĂ© trĂšs rare » mais aussi perle » = ce n'est pas un dĂ©bit abondant, _______..l'organe de celui qui parle est de nacre » = idĂ©e de blancheur, de puretĂ© la parole est prĂ©cieuse, _______..et cette parole sert Ă orner », c'est-Ă -dire qu'elle a un but RaretĂ© + puretĂ© + esthĂ©tique = caractĂ©ristiques de la parole â la perle dont il s'agit est en fait un poĂšme le texte est donc une sorte d'allĂ©gorie sur la crĂ©ation _______..poĂ©tique, l'huĂźtre qui produit la perle serait alors le monde lecture rĂ©trospective du poĂšme au vu de cette signification § la crĂ©ation poĂ©tique vue de l' L'insistance sur l'idĂ©e de fermeture, de quelque chose qui est clos », rugueux », met en Ă©vidence ____..l'hermĂ©tisme poĂ©tique pour les autres, qui voient cela comme quelque chose de peu abordable, de ____.. La difficultĂ© pour ouvrir l'huĂźtre symbolise la difficultĂ© d'entrer dans l'univers poĂ©tique pour quelqu'un qui ____..n'est pas initiĂ©, mĂȘme si cette entrĂ©e est possible Ă force d' Toutefois il y a une dĂ©valorisation de ces tentatives d'intrusion ______âȘ La connotation de violence on a l'impression que les "profanes" en poĂ©sie violeraient une sorte de _______refuge, d'ailleurs ils abĂźment l'huĂźtre par leurs tentatives d'intrusion puisque leurs coups ... _______marquent son enveloppe de ronds blancs ».______âȘ C'est parce que leur motivation est mauvaise tout d'abord, on peut penser qu'ils cherchent _______absolument Ă s'approprier les secrets de cette crĂ©ation ils tiennent l'huĂźtre au creux d'un torchon » _______et simplement par curiositĂ© doigts curieux » ou malveillance ou traĂźtrise couteau Ă©brĂ©chĂ© et peu _______franc ».___ Mais beaucoup s'y coupent, s'y cassent les ongles » en d'autres termes, ils s'y cassent les dents = ____..ils ne parviennent pas Ă rentrer dans cet univers poĂ©tique parce qu'ils sont trop grossiers ».___ â tout cela explique donc la prĂ©sence des personnifications et autres § le monde du poĂšte Ă l'intĂ©rieur de l' monde de la crĂ©ation poĂ©tique ___⣠Un monde caractĂ©risĂ© par le cĂ©leste une dimension supĂ©rieure, cf. rĂ©fĂ©rence aux astres halos », ____..firmament », aux cieux ».___⣠Un monde riche, abondant, oĂč tout se mĂȘle ______â MĂ©lange de tous les sens, de toutes les Les choses n'ont plus une forme fixe, elles se â un monde difficile Ă saisir, Ă on trouve ... Ă boire et Ă manger » le monde de la crĂ©ation, quand on parvient Ă l'aborder, est ____..capable de nourrir celui qui le dĂ©couvre, c'est-Ă -dire qu'il va le rassasier, le combler au sens figurĂ© des ____..termes.â> On a donc bien affaire Ă un poĂšme, malgrĂ© son apparence trĂšs prosaĂŻque de prose, qui se trouve ĂȘtre, qui plus est, une sorte de mise en abyme, puisqu'il traite du processus de la crĂ©ation poĂ©tique et de la perception du monde poĂ©tique par les gens extĂ©rieurs. Toutefois, le travail poĂ©tique de Ponge ne suit pas tout Ă fait le mĂȘme sens que d'autres poĂšmes il ne va pas chercher Ă exprimer certaines idĂ©es par des images poĂ©tiques, il part avant tout de l'objet et ce sont les particularitĂ©s de cet objet qui l'amĂšnent Ă une symbolique, il se propose de voir l'objet sous un autre jour, mais en s'imposant toujours de partir de l'objet lui-mĂȘme, c'est Ă proprement parler » le sens figurĂ© ne vient qu'aprĂšs. Ponge donne Ă ce type de poĂšme le nĂ©ologisme de objeu » de objet » et jeu ».___IV Ce poĂšme propose une autre façon de faire de la poĂ©sie on part de l'objet, et on joue sur les _______connotations sens propre et sens figurĂ© l'objet contient les deux sens. La 1Ăšre place est donnĂ©e Ă _______l'objet, pas au Le poĂšte est diffĂ©rent des autres, le monde poĂ©tique est clos, difficile d'accĂšs. Le poĂšte est celui qui _______est capable de voir les diffĂ©rentes significations que peut avoir un objet.ï»żQuestionnairesur le poĂšme de Francis Ponge, "L'huĂźtre" extrait du recueil Le parti pris des choses (1942). Jump to navigation. Les nouvelles oeuvres au programme 2022-2023 seront disponibles prochainement
Lettres - Compte Rendu de Lecture Le parti pris des choses de Francis Ponge ______________________________________________________________________________ ______________________________________________________________________________ Le parti pris des choses est un recueil de poĂšmes Ă©crit par Francis Ponge en 1942. LâintĂ©gralitĂ© des poĂšmes qui le composent sont en prose. Ils pourraient ĂȘtre dĂ©finis de la maniĂšre suivante ce sont des descriptions de choses simples, dâĂ©lĂ©ments du quotidien, pouvant sembler tout Ă fait anodins au premier abord mais quâil sâapplique ici Ă mettre en lumiĂšre. Câest dâune certaine maniĂšre comme si le poĂšte rĂ©vĂ©lait la beautĂ© et tout le substrat sensible des Ă©lĂ©ments existants, lâentourant, sur lequel son regard se pose. Les sujets de ses poĂšmes varient mais prĂ©sentent nĂ©anmoins quelques points communs il peut sâagir dâĂ©lĂ©ments naturels tels que la pluie ou le feu, de nourriture comme lâhuitre, les mures, le pain, ou encore de paysages avec le bord de mer. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, câest la nature qui inspire Francis Ponge. Cette fascination toute particuliĂšre se ressent dans le choix de ses sujets et dans lâattention quâil a portĂ© Ă ses composants, que nous percevons au travers de ses poĂšmes. Francis Ponge ne cherche pas Ă embellir la rĂ©alitĂ©, mais Ă la prĂ©senter la plus honnĂȘtement possible, parfois mĂȘme de maniĂšre crue ou qui pourrait sembler embarrassante. La rĂ©alitĂ© des faits, dans la laideur ou les aspects les moins esthĂ©tiques quâelle peut comprendre ne lui fait pas peur. NĂ©anmoins, le talent du poĂšte est notamment Ă relever dans le fait que malgrĂ© cette objectivitĂ© notable de laquelle il souhaite sâapprocher au plus prĂšs, il parvient Ă faire ressortir une rĂ©elle beautĂ© de ses poĂšmes. En tant que lectrice, jâai eu cette impression Ă la lecture des poĂšmes de Ponge, que ce dernier me donnait une loupe ou des jumelles, tout au moins les bons instruments pour percevoir la beautĂ© du monde. Dâune certaine maniĂšre, nous pourrions mĂȘme aller jusquâĂ accorder Ă la poĂ©sie de ce poĂšte un aspect curatif, une sorte de remĂšde Ă la morositĂ© et Ă lâennui que peut parfois prĂ©senter la vie il fait don ici dâune invitation Ă voir et percevoir le monde sous un aspect diffĂ©rent, plus doux et positif. Par consĂ©quent, je ferais le parti pris dâorienter cette Ă©tude autour de la problĂ©matique suivante comment lâauteur peut-il nous toucher au plus profond de nous mĂȘme avec du banal ou du laid, des entitĂ©s se dĂ©finissant tellement par communes » quâil semble Ă premiĂšre vue presque impossible de les rendre originales ou mĂȘme surprenantes ? Pour ce faire, nous nous demanderons dans une premiĂšre partie si Francis Ponge cherche rĂ©ellement Ă peindre une rĂ©alitĂ©, et si oui quelle est-elle. Dans une seconde partie, nous nous pencherons sur les outils dont se sert le poĂšte afin de nous faire comprendre et apprĂ©cier Ă sa maniĂšre les diffĂ©rentes entitĂ©s et phĂ©nomĂšnes quâil perçoit. Enfin, notre derniĂšre partie portera sur la relativitĂ© Ă apposer au laid, et au jugement sensible de maniĂšre gĂ©nĂ©rale Ă laquelle nous invite Francis Ponge. *** A la lecture des poĂšmes de Ponge, survient la question de savoir si ce quâil dĂ©crit existe rĂ©ellement, ou bien nâest que le fruit de son imagination, de ses espoirs peut-ĂȘtre, de ses projections SMrk.